Vincent Tassy, Comment le dire à la Nuit, Éditions du Chat Noir, collection Griffe Sombre, 5 septembre 2018

Publié le par Maude Elyther

illustration par Délicate Distorsion

illustration par Délicate Distorsion

4ème de couverture

La dame en noir vivait seule dans son château.

Elle ne pouvait pas mourir.

De tout ce temps qu’elle avait, elle ne faisait rien.

Et puis un jour, elle trouva sur son chemin le garçon

aux cheveux blancs.

Elle l’enleva.

Elle voulait vivre une histoire.

Une histoire d’amour et de nuit qui traverserait les

siècles.

 

« Si vous devez suivre une plume francophone, c’est celle-ci, elle provoque quelque chose et résonne encore longtemps en nous, une fois le livre refermé. » Margaud Liseuse

Vincent Tassy, Comment le dire à la Nuit, Éditions du Chat Noir, collection Griffe Sombre, 5 septembre 2018

Lettre d'amour

Comment le dire à la Nuit a été l'une des sorties que j'ai attendues avec le plus d'impatience cette année ! Rien d'étonnant puisqu'il s'agit du nouveau roman de Vincent Tassy.

Si Vincent est l'un de mes auteurs chouchous, il est surtout l'un des rares auteurs dont les textes me touchent avec autant de forces. Bien sûr, nous avons plusieurs thématiques communes dans nos écritures, cela joue, mais je ne sais pas comment l'expliquer autrement que par : je suis amoureuse de ses écrits. Alors effectivement, tomber amoureuse d'un roman, ça n'arrive pas tous les jours ; et malgré tous les livres que j'ai pu lire jusqu'à présent, et que j'ai beaucoup aimé voir adoré pour la plupart, le travail de Vincent occupe une place bien particulière. Est-ce la sensibilité qui se dégage de sa plume, la mélancolie, la beauté des scènes, qui souvent semblent figées dans le temps, les personnages qui laissent l'impression d'un rêve vaporeux, les références, littéraires, musicales, filmographiques, qui extrapolent ses récits dans notre réalité, ce sentiment de rêve lointain ou proche ?

Lire un texte de Vincent, c'est une expérience de rêve éveillé. La nature humaine, la notion du genre multiple (l'androgynie, le transgenre), les rêves et la contemplation, les arts, les fleurs, les vampires, l'amour, la folie parfois... tout cela crée un univers, une musique aux notes esthétiques (car tout est beau dans l'univers de Vincent : la plume, les images, les sentiments des personnages,...) qui touchent juste, qui parlent d'humanité, d'éternité/de néant.

Je souligne son œuvre poétique qui réfléchit les mouvances gothiques et romantiques : pour au auteur francophone contemporain, il n'est pas commun de trouver cet univers. C'est comme des fantômes dans les landes, un manoir "vivant", des statues de marbre sous le clair obscur de la lune, des rêveries mélancoliques et impossibles dans une roseraie, un baiser imaginaire, des œuvres de peintres pré-rapahaéliques, des films de vampires en noir et blanc et muets, un cimetière brumeux où erre une veuve victorienne... Les écrits de Vincent son éminemment visuels, mais les autres sens ne sont pas en reste.

J'ajoute, et ensuite je passe à Comment le dire à la Nuit, que c'est pour parler d'Apostasie, le premier roman de Vincent, si j'ai commencé à rédiger des chroniques, et aussi que ses textes m'inspirent fabuleusement (à tel point que dans un nouveau roman, dont j'ai récemment commencé l'écriture, je fais des clins d’œil directs à Apostasie).

Mots Clefs

vampires - mélancolie - gothique - amours - rose - vide - blanc - noir et blanc - sensible - beauté - musique - littérature - fleurs - douceur - hiver - arts

rose rose pâle (Adriel), thé à la menthe (Cléopâtre et Rachel)

rose rose pâle (Adriel), thé à la menthe (Cléopâtre et Rachel)

Les personnages

Comment le dire à la Nuit présente plusieurs personnages, à des époques différentes, qui vont être amenés à se croiser, à se rencontrer, à s'aimer, à se déchirer. Cela a pour origine la découverte d'Athalie.

1691. Athalie, une femme qui s’ennuie dans un château, jusqu'au moment où elle rencontre Adriel, ce garçon blanc à la chevelure impossible. Quelque chose se brise en Athalie, son cœur en éclats, car enfin elle est sensible à la beauté. Elle l'enlève pour l'élever comme son enfant. Seulement, son amour est trop grand, incompréhensible, que la folie la guette. Elle a rapidement fondé de grands projets pour Adriel, pour le monde. Est-ce au sein de la nature première d'Adriel que persiste un éclat douloureux, quasi sauvage, sa rébellion soudaine qu'Athalie ne comprend pas ?

Environ deux siècles plus tard. Egmont aime un homme, à une époque où cela est impossible, caché. Or il doit se marier, avec une jeune fille de son âge. Pourtant, l'apparition d'une créature androgyne aux longs, très longs, cheveux couleur neige apparaît au détour de la roseraie, et dans leur malheur à tous, une femme, tout en noir, fait également son apparition.

De nos jours. Rachel se plaît à apparaître comme une fleur lisse et fanée. Elle est emplie de vide, tout entière tournée sur le silence. Elle n'a jamais rêvé d'amour, se complaît dans la solitude – sa salle de bal dorénavant poussiéreuse plongée dans la nuit , et la musique de Cléopâtre. Pourtant, le hasard, ou le destin, va la contraindre à sortir de chez elle ; c'est là qu'elle va faire une rencontre, une rencontre qui va bouleverser sa vie.

Et puis il y a Parascève, directrice de collection dans une maison d'édition dédiée à la romance. Parascève qui idolâtre les romans de Barbara Cartland, qui vit, littéralement, dans un univers de soap opera. Quelles sont ces crises, ces trous noirs, ces transes extralucides qui lui font voir/connaître des choses intimes – comme l'origine de la douleur dans le regard de Rachel  ?

Tous se font écho, par le vide, le silence, les rêves, l'amour, la douleur de la perte,...

Il fut seul.
Le silence du vent dans les arbres morts l'enchanta. Et l'absence de toute odeur, dans le froid. Et les oiseaux immobiles sur les branches. Il demeura.
Aux dernières lueurs roses, il quitta le cimetière.
Il marcha vers le lac. Dans la combe.
Ses pas l'emmenèrent à l'ombre des falaises, sur un banc de pierre gelée. C'était près des tombes. Oui, aux Fleurs du Cygne. Il venait d'arriver aux Fleurs du Cygne. Sur le banc où Léopold l'avait trouvé, il y a bien longtemps. Au bord de la mare.
C'était là. Nous étions là, mon amour, à la lisière des tombes, deux silhouettes voilées.
Egmont regarda la mare en tremblant de froid.
La mare n'était pas gelée.
Et les cygnes. Ils étaient là, ils flottaient. Ne disparaissaient-ils pas, en hiver ? Ne fuyaient-ils pas le froid ? Mais ce soir, ils étaient là.
Egmont les observa.
Enfin il se laissa pleurer.
La vue de l'eau, peut-être. La grâce triste des cygnes.
Soudain la surface de l'eau se mit à ondoyer, au milieu de la mare.
Une forme en émergea.
Lentement, lentement.
Elle s'approcha du bord, du banc de pierre gelée.
Lentement, lentement.
Quelques instants plus tard la forme fut tout à fait sortie de l'eau, dressée devant lui.
Egmont le reconnut.
C'était Adriel.
Adriel, drapé dans ses cheveux, le regarda. Lui sourit.
Un sourire d'une tendresse si absolue, si douloureuse, que le cœur d'Egmont vola en éclats, délivrant ce qu'il retenait encore de ses sanglots.
Adriel tendit les mains. Pour l'inviter à venir contre lui.
Et Egmont se leva. Se sauva dans cette étreinte. Blottit son visage dans le cou, les cheveux incolores d'Adriel. Il se senti envahir d'une paix qu'il n'avait jamais connue. Une quiétude triste, claire, une mer calme de larmes.
Ils ne se dirent rien.
Qu'aurait-on pu se dire ce soir, dans le silence, à l'oreille endormie des cygnes, comment dire la nuit, ce vide en soi, comment le dire à la nuit.

Vincent Tassy, Comment le dire à la Nuit, Éditions du Chat Noir, collection Griffe Sombre, 5 septembre 2018

Les décors

Un château très vieux au milieu d'une forêt, avec ses escaliers infinis, ses chambres avec un cercueil, son bassin dans les profondeurs à l'eau pure, son dressoir vide, ou presque ; partout le vide, comme une projection d'Athalie. Voilà où elle vit, dans l'ennui et le silence.

L'appartement de Parascève, un boudoir de soap opera. Rose, brillants, fleurs, romans d'amour, alcool et cigarettes.

Le café préféré de Cléopâtre, aux recoins infinis, avec ses escaliers dans tous les sens, ses bibliothèques débordantes. La salle d'opéra, le restaurant 5 étoiles.

Les Fleurs du Cygne, le cimetière abandonné baigné dans la brume et le givre, dans une région où le soleil existe à peine. Ses pierres gelées et sa mare.

Mais aussi une église abandonnée, une cité en ruine, un appartement qui est imprégné de  l'odeur de poussière et de fleurs fanées, une tour donnant sur un jardin galant, les paysages blancs de rêves, un manoir glacé et sombre, une chambre funéraire, etc.

Les décors, très visuels, marquent des ambiances, des impressions ; ils font écho aux personnages, comme si ces derniers s'abîmaient en eux. Les lieux sont finalement des personnages à part entière, car chacun a un rôle : chacun représente l'univers des personnages ; leur vide, leur rencontre, leurs retrouvailles...

Le silence qui les imprègne résonne pourtant de cris d'amour tus, de chagrins contenus coûte que coûte. Mais il y a également les cris, les pleurs, les échos de la folie, les monologues à soi-même. Dans tout cela se superpose la musique, la littérature, l'Art. A Flock of Seagulls, Spandau Ballet, le générique des Feux de l'Amour. Marguerite Duras, les poèmes d'Emily Dickinson, Barbara Cartland. Rossetti, Burne-Jones.

Comment le dire à la Nuit est un roman en noir et blanc, aux touches de rose (bonbon, pâle) : la nuit, la neige, la douceur du blanc, les chevelures, les roses... Et les décors sont pareils aux dédales de l'âme humaine, aux failles et aux gouffres de nos émotions, de nos rêves, de notre vulnérabilité.

― Nous sommes là au milieu des choses silencieuses. Il y a le ciel, tout ce qu'on aperçoit dans le ciel. L'herbe. Le bois. La roche. Le tissu. Le papier. Les meubles. Les bibelots. Les vases. L'eau. Toutes ces choses. Je ne les comprends pas. Les années ont passé et j'ai cessé de les comprendre. Je n'ai plus entendu leur voix. C'est parce qu'elles n'en ont pas. J'ai envie de m'arracher la tête, les yeux, oh oui. Je comprends tout, vous de même. Il n'y a que le silence et parfois on danse. On danse de ne rien entendre, le chaos, on danse, c'est un amour infini, on danse d'avoir dépeuplé l'ombre et de ne plus savoir, rien. Entendez-vous les secrets que la mer vous chuchote ? Moi non plus. La mer ne chuchote pas. C'est de l'eau. C'est ainsi. Nous sommes des étrangers. Nous ne savons rien. J'ai appris le silence, moi je l'ai appris, et maintenant c'est fini, je ne peux plus, qu'apprendre après le silence, qu'apprendre d'autre que lui, rien ne parle, ce pourrait être terrible, un abîme de solitude, mais être seul, c'est juste être seul, c'est qu'on est là et qu'il n'y a personne d'autre, et c'est tout, c'est tout, a-t-on l'obligation d'en pleurer ? Et puis là, coup de théâtre, ma chère, coup de théâtre.
Athalie s'accroupit devant la grille et dit à voix basse :
― J'ai découvert que j'avais le pouvoir de tout réduire au silence.

Vincent Tassy, Comment le dire à la Nuit, Éditions du Chat Noir, collection Griffe Sombre, 5 septembre 2018

L'univers

Roman gothique empreint de la mouvance romantique, Comment le dire à la Nuit révèle une identité singulière : les décors "classiques" paraissent "vivants" tout en étant remplis de vide et de silence, imperturbables au temps qui passe. En effet, sur l'ensemble du texte, se dégage une lenteur évanescente, comme si le temps était figé, quand bien même les siècles ont passé.

Les personnages incarnent le vide qui les constitue, ce néant que certains tentent d'apprivoiser via le silence. Et pourtant, malgré cela, malgré leur apparence de poupées, de fleurs fanées, de créatures tout droit échappées de contes de fées propres à Vincent, ils ont soif, soif d'amour. Aimer qu'est-ce que c'est ? Sombrer dans la folie, dans la mégalomanie ? S'oublier pour rêver sans fin de l'être aimé, de l'aimer sans le voir, sans le toucher ? Ou encore de repousser, chercher à détester l'autre ? Comment le dire à la Nuit raconte des histoires d'amour : l'amour d'une mère, l'amour de deux hommes, l'amour naissant de deux femmes, l'amour d'une créature à travers l'amour de deux personnes, l'amour pour les romans d'amour, l'amour du vide, de son apparence qu'il a fallut inventer.

Au fond, les origines importent peu, de même que le genre, la nature. Androgyne, transgenre, vampire, humain. Une valse berçante, un film presque muet où il ne se passe rien, où il se passe le déroulement de plusieurs vies, un théâtre où se jouent les pièces des émotions humaines les plus pures, les plus fortes, les plus annihilantes ; où nous nous oublions, bercés par la douceur du blanc, l'évanescente mélancolie.

Comme le yin et le yang, Athalie et Adriel se complètent, se repoussent. Pourtant ils ne savent que faire de ces sentiments qui les lient, qui les font se fuir et se chercher à l'infini. Athalie, la dame noire. Adriel, le garçon blanc. Ils échangent leurs couleurs cependant : le début du roman est blanc avec Athalie, et il se clôt sur le noir avec Adriel. Dans cet univers en noir et blanc, Athalie crée son jardin galant, un soap opera propre à elle qu'elle veut étendre au monde entier, avec des fleurs, du rose, des brillants, et ses anges de plâtre.

Les décors se superposent, par transparence : le jardin galant, la roseraie, Les Fleurs du Cygne, la manoir froid et sombre, l'église abandonnée, la cité en ruine, l'entrepôt désaffecté reconverti en boîte de nuit, le château ancien, la scène où se produit Cléopâtre, les appartements,... Car les lieux aussi se regroupent, se rejoignent, à l'image des personnages.

Je me suis beaucoup attardée sur le côté visuel de Comment le dire à la Nuit, mais les autres sens sont également présents. Le parfum des roses, des fleurs fanées, même la poussière, la neige et le givre "inodores", la fragrance de la forêt en automne. La douceur de la neige, des cheveux, de la peau, d'Adriel, le contact des pierres gelées, de deux peaux l'une contre l'autre, une étreinte, une gifle. Le thé à la menthe, le sang, l'alcool, les cigarettes. La musique, le silence, les pleurs, les cris, les murmures, les paroles comme une berceuse, les monologues d'une folle, les mots étranges d'une créature androgyne. La part belle est ainsi faite à la glacialité, l'hiver, et l'on perçoit également l'automne – que dire de plus qui ne convoque pas déjà toute cette ambiance entre deux-mondes ?

Ce roman de Vincent est très sensoriel, d'une autre sensibilité encore que Apostasie, et c'est l'une des raisons pour laquelle il marque autant, pendant et après, longtemps après, la lecture.

Mélancolie rose.
Son rêve, à Athalie. Répandre la nuit silencieuse de ses baisers. Nous serions des pantins diaphanes, des fleurs sans voix, pâles fantômes dans des romans d'amour.

Vincent Tassy, Comment le dire à la Nuit, Éditions du Chat Noir, collection Griffe Sombre, 5 septembre 2018

La plume

Le style de Vincent, bien que moins littéraire ici que pour Apostasie, demeure poétique, sensible, et se montre même très musical. Et quelle beauté ! J'affirme en toute honnêteté que je n'ai pas pour beaucoup d'auteurs/livres/textes autant d'étoiles dans les yeux pendant la lecture (malgré mon adoration des livres). J'ai savouré chaque chapitre de Comment le dire à la Nuit, relisant plusieurs fois des passages, des phrases, faisant des pauses par moment, assaillie par l'émotion et l'émerveillement. Voilà, ce n'est peut-être pas objectif, car j'adore depuis le début les écrits de Vincent (oui, j'ai toute la collection : romans, anthologies, revues). Sa plume ne donne pas seulement vie à son univers, elle en fait partie intégrante. C'est une voix, une mélodie, une berceuses, un murmure évanescent, le vent sur la surface de l'eau ou dans la forêt, le chant des fleurs nocturnes.

Dans son nouveau roman, Vincent transmet la pérennité de thématiques comme l'amour, car l'amour ici ne reconnaît pas les siècles ; l'immortalité semble éphémère, et le vide, un cosmos, un autre univers, à arpenter. Il est donc question d'atemporalité : Vincent s'abreuve des littératures des siècles passés, il les réinjecte de nos jours, démontrant une certaine permanence dans nos rêves, nos aspirations, notre condition humaine. Son écriture brouille les frontières entre le réel et l'imaginaire, le fantastique, l'onirisme ; Vincent parle de notre constante, et sans doute désespérée, recherche de magie, à travers les histoires que nous (nous) inventons, à travers notre vision fictive de nous-même, à travers le vide que nous contemplons ou que nous remplissons vaille que vaille, en vain. Il évoque cette force, animale, archaïque, qui nous submerge, qui nous gouverne malgré nous ; celle de l'amour. Le besoin d'aimer, même au détriment d'être aimer. Et si notre existence n'avait de sens qu'en cela, aimer, se consacrer à aimer ? que ce soit une personne, même de loin, sans l'approcher, sans la toucher, ou encore un rêve fou, comme un jardin galant, ou bien une scène imaginaire, une salle de bal aux allures de funérarium ?

À mes yeux, et à mon cœur, Comment le dire à la Nuit est sublime. Je n'arrive pas précisément à dire en quoi il diffère d'Apostasie (que j'adore toujours autant)... Sans doute aussi car sur le nouveau roman de Vincent flotte davantage la douceur que la mélancolie propre à Apostasie.

Comment le dire à la Nuit est sublime au point de m'avoir laissé les larmes aux yeux (je n'exagère pas quand je dis que les textes de Vincent sont riches en émotions, et en sens pour moi), grâce à la combinaison de l'univers (les personnages, les décors, les thématiques...) et de la plume de Vincent.

Pardonne-moi, Athalie. Je vivrai ainsi. Dans l'illusion, peut-être. Je m'inventerai des histoires, c'est vrai ; je ne pourrai pas m'en empêcher. Parfois j'imaginerai que je suis un personnage de roman. Qu'une ligne claire guide mes pas. Je me souviendrai du voile de tristesse dans tes yeux, dans les yeux de Rachel, je me souviendrai de ta couronne de silence, de tes enfants disparus, des longs cheveux d'Adriel, et ce sera comme une musique triste au fond de mon cœur, un conte de fées.

Vincent Tassy, Comment le dire à la Nuit, Éditions du Chat Noir, collection Griffe Sombre, 5 septembre 2018

Pour conclure ?

À chaud, j'avais manqué de mots pour dire à Vincent combien j'ai aimé Comment le dire à la Nuit. Écrire que j'ai été captivée et éblouie/émerveillée par la beauté qui se dégage de chaque page de son nouveau roman. Que sa plume, si sensible, musicale, pour ces histoires d'amour fait résonner la mélancolie, scintiller le vide et le silence, enveloppant de la douceur du blanc, comme un rêve vaporeux. Ajouter que l'univers de Apostasie ne m'a jamais quittée depuis que je l'ai lu (en mars 2016 !), et qu'il va en être de même pour Comment le dire à la Nuit. Tout cela, je trouvais que ça ne voulait pas dire grand chose. Et maintenant que j'ai passé toute une après-midi à recopier des passages entiers de ce bijou, et une autre à rédiger cette chronique, je ne suis pas sûre d'avoir tout dit. D'avoir dit plus. Et en même temps, j'ai l'impression d'en avoir dit trop.

Puis je me rends compte que j'ai écrit là une déclaration d'amour, une déclaration d'amour à un roman. Et je n'ai toujours pas les mots justes pour dire combien ce roman résonne en moi, pour dire combien j'ai été touchée par chaque chapitre, chaque personnage, chaque page ; pour dire que moi-aussi je flottais, comme les cygnes sur la mare des Fleurs du Cygne, pendant la lecture, que la douceur et les émotions m'ont tant touchée que je ne voulais pas tourner la dernière page, quand bien même un sentiment d'absolu demeurerait. Vincent a mis des mots sur des éléments, des sensations, enfouis, comme le vide, la nuit, en nous ; et cela il l'a écrit en  forme de sérénade pour la nuit, la lune, le ciel étoilé ; pour le néant dans lequel brille l'amour.

Longue est la nuit, triste la cendre.
C'est beau, la nuit, quand il n'y a plus d'étoiles, quand rien ne brille que l'amour infini d'une morte.

Vincent Tassy, Comment le dire à la Nuit, Éditions du Chat Noir, collection Griffe Sombre, 5 septembre 2018

Références artistiques

Pour prolonger l'ambiance de Comment le dire à la Nuit, voici quelques unes des diverses références artistiques du roman.

Quelques œuvres littéraires (auxquelles j'ajoute l'intégralité des romans de Marguerite Duras). Quelques peintures de Dante Gabriel Rossetti, et de Sir Edward Coley Burne-Jones (j'ai choisi des œuvres qui m'évoquent des thématiques de Comment le dire à la Nuit). Un titre de Spandau Ballet.

Les poèmes d'Emily Dickinson, Les Années Douces de Kawakami Hiromi, Athalie de RacineLes poèmes d'Emily Dickinson, Les Années Douces de Kawakami Hiromi, Athalie de RacineLes poèmes d'Emily Dickinson, Les Années Douces de Kawakami Hiromi, Athalie de Racine

Les poèmes d'Emily Dickinson, Les Années Douces de Kawakami Hiromi, Athalie de Racine

Dante Gabriel Rossetti : Lilith (vers 1867), La Veuve Romaine Dante Gabriel Rossetti : Lilith (vers 1867), La Veuve Romaine

Dante Gabriel Rossetti : Lilith (vers 1867), La Veuve Romaine

Sir Edward Coley Burne-Jones : Tristram and Iseult (1872, Private Collector, England), The Knights and the Briar Rose, The Sleeping Knights (étude)Sir Edward Coley Burne-Jones : Tristram and Iseult (1872, Private Collector, England), The Knights and the Briar Rose, The Sleeping Knights (étude)Sir Edward Coley Burne-Jones : Tristram and Iseult (1872, Private Collector, England), The Knights and the Briar Rose, The Sleeping Knights (étude)

Sir Edward Coley Burne-Jones : Tristram and Iseult (1872, Private Collector, England), The Knights and the Briar Rose, The Sleeping Knights (étude)

En lien ci-dessous : une interview récente de Vincent, ainsi que sa page auteur.

Les autres romans de Vincent : Apostasie (un conte macabre sur lequel souffle la puissance des rêves), et Effroyable Porcelaine (un roman jeunesse à mettre entre toutes les mains !)Les autres romans de Vincent : Apostasie (un conte macabre sur lequel souffle la puissance des rêves), et Effroyable Porcelaine (un roman jeunesse à mettre entre toutes les mains !)Les autres romans de Vincent : Apostasie (un conte macabre sur lequel souffle la puissance des rêves), et Effroyable Porcelaine (un roman jeunesse à mettre entre toutes les mains !)

Les autres romans de Vincent : Apostasie (un conte macabre sur lequel souffle la puissance des rêves), et Effroyable Porcelaine (un roman jeunesse à mettre entre toutes les mains !)

Illustratrice

Pour la couverture de Comment le dire à la Nuit, le Chat Noir a fait appel à Délicate Distorsion, qui a livré une illustration en noir et blanc, avec des fleur, un cygne, et la lune. Voilà qui représente bien le roman, et qui me fait penser à mon passage préféré (Egmont et Adriel aux Fleurs du Cygne) :

Vincent Tassy, Comment le dire à la Nuit, Éditions du Chat Noir, collection Griffe Sombre, 5 septembre 2018

Plus

Je songe énormément au film Only Lovers left Alive, de Jim Jarmusch, suite à la lecture de Comment le dire à la Nuit : la beauté, l'amour, le temps figé, l'immortalité...

Au roman La Sève et le Givre, de Léa Silhol, qui doit être mon grand premier coup de coeur littéraire. Au Dit de la Terre Plate de Tanith Lee, une oeuvre magnifique, magistrale, poétique et visuelle.

Vincent Tassy, Comment le dire à la Nuit, Éditions du Chat Noir, collection Griffe Sombre, 5 septembre 2018Vincent Tassy, Comment le dire à la Nuit, Éditions du Chat Noir, collection Griffe Sombre, 5 septembre 2018Vincent Tassy, Comment le dire à la Nuit, Éditions du Chat Noir, collection Griffe Sombre, 5 septembre 2018

Pour finir

Parce que j'ai beaucoup pensé à Sopor Aeternus au cours de ma lecture (surtout avec l'ambiance autour de Cléopâtre durant son premier concert), et aussi parce que  coïncidence ?  j'écoute en boucle ce titre depuis quelques temps, voici Beautiful :

Publié dans chronique personnelle

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F
Je t'avoue que mon livre est aussi rempli de crayon pour tous les passages que j'ai adorés (j'en suis habituellement à 2-3 passages par livre, ici c'est toutes le 2 pages en moyenne !). <br /> <br /> Dans les références littéraires, j'ai personnellement envie de lire un Barbara Cartland maintenant :p<br /> <br /> Et pour la musique d'ambiance, je n'ai pas été cherché loin, j'ai écouté "Shades of Sorrow d'Angellore :)<br /> <br /> Merci pour cette belle chronique, ça va être dur de passer après toi :D
Répondre
M
Haha :) Pour ma part, j'ai 30 ou 31 pages word...<br /> <br /> Oui moi aussi, j'avoue que ça m'intrigue du coup ! Et le roman Les Années Douces (que je ne connaissais pas du tout avant le roman de Vincent) :)<br /> <br /> Excellent choix ;) Pour ma part, pour Apostasie, je pense tout le temps au titre Moonflower de l'album La Litanie des Cendres ❤<br /> <br /> Oooh, mais non ta chronique va être super ! ❤