Je suis ta Nuit, Loïc Le Borgne, Éditions ActuSF, collection Les Trois Souhaits, 5 juin 2020
4ème de couverture
La France, un été, quelque part dans les années 80. Pendant un banal concours de casse-bouteilles, six enfants découvrent un cadavre mutilé, sans lèvres, sans sexe et sans doigts. Et ce n’est que le premier d’une longue série. Pierre et sa bande de copains inséparables sont obligés d’enterrer leur enfance et certains de leurs proches alors que le Puits et l’homme au chapeau haut-de-forme s’emparent peu à peu de leur innocence.
Avec Je suis ta nuit, Loïc Le Borgne nous offre un véritable page-turner de l’angoisse.
Avant-propos
Je remercie Jérôme et les Éditions ActuSF pour l'envoi de ce nouveau service presse. Je suis ta nuit est une rééditions (première parution en 2010) et offre un roman divertissant qui rend hommage à Stephen King tout en faisant écho à la série Stranger Things.
Mots clefs
fantastique - horreur - enfants - enfance - perte de l'innocence - adolescence - ombres et lumière - imaginaire - année 1980 - Bretagne - amitié - cadavres - corbeaux - légende urbaine - croquemitaine - nuit - aventures - Mal
Innocence perdue
Je suis ta nuit, c’est l’histoire qu’a vécue Pierre, aujourd’hui adulte et père. Alors que son fils se trouve confronté au suicide d’une amie, Pierre se décide à prendre la plume pour conter les angoisses et horreurs de 1980, cette époque où lui et ses amis, âgés de 11 à 12 ans, ont été forcé de se dépouiller de leur innocence.
Macabre découverte
Pierre adulte narre ainsi ce village de Bretagne où lui et ses amis vivent, avec son église étrange sur un promontoire, les coins de nature entre brouillasses, marais sauvages et terrains de jeux… Ils sont six, avec l’arrivé d’un nouveau qui devient le chef de leur bande, Maël. Cette année-là, des phénomènes étranges se produisent ; imagination ? Pas si sûr lorsque leur groupe découvre, alors qu’ils s’amusent à casser des bouteilles dans un terrain vague abandonné, un cadavre. Un cadavre nu et mutilé.
Légende urbaine – croquemitaine breton
À partir de ce moment, malgré l’insouciance qui caractérise leur jeunesse, leurs amusements, leurs rires jusqu’aux larmes, quelque chose de sombre se rapproche et les tourmente. La Mal s’incarnerait-il dans leur bourgade ? Tout porte à le croire, notamment la légende urbaine que rapportera Maël, celle à propos d’une Bonhomme Nuit, un croquemitaine personnalisant à lui seul les peurs des enfants, reflet du Père Fouettard, ou plutôt de Krampus (l’apparence démoniaque en moi).
Le noir
Le noir s’abat : des minutes où l’on se retrouve aveugle, des nuées d’insectes et des animaux féroces, des noirceurs humaines qui surgissent comme une rivière hors de son lit… Et ce personnage, le Bonhomme Nuit, qui émerge au milieu de tout ça : que veut-il ? que cherche-t-il ?
Ombres et lumières - le pouvoir de l'imaginaire
La bande d’amis traverse ombres et lumières, empreinte de l’innocence de l’adolescence avec sa soif d’aventures et d’imaginaire gonflé à bloc. Les nostalgiques des années 80 seront ravis d’y dénicher de nombreuses références de cette époque. L’atmosphère se fait de plus en plus oppressante, sans tomber dans le pathos pour les adolescents confrontés à des scènes et découvertes terribles.
Cycle
La présentation de ce roman met en avant la perte de l’innocence des jeunes personnages, leur passage forcé à l’âge adulte, pourtant je n’ai pas vu/ressenti cela. Entre le Pierre ado et le Pierre adulte, j’ai trouvé le premier bien plus prompt à faire face. Le second se montre plus vulnérable et fragile face à ses souvenirs, comme s’il ressentait toute l’horreur et les angoisses tourmenteuses à rebours. Comme si l’histoire du Bonhomme Nuit n’était pas terminée…
L’écriture
Malgré, à mes yeux, un manque quant aux émotions des personnages, l’écriture est maîtrisée, sur le font et sur la forme, avec une oppression de plus en plus étouffante à mesure que l’intrigue avance. Certaines scènes, très visuelles, se démarquent en particulier (l’affrontement dans l’église par exemple).
L’angoisse
Malheureusement, je n’ai pas été sensible au côté angoissant promis par la 4ème de couverture… (mais je n’ai jamais ressenti de telles émotions en lisant). Cependant, je ne doute pas qu’il saura en faire frissonner plus d’un.e !
J'ajoute qu'ici l'élément le plus ignoble ne se trouve pas forcément dans le "monstre" que l'on croit... Le surnaturel/le fantastique sont propices à la création et l'émergence de créatures abjectes, alors que l'être humain sait se montrer pire...
En bref : entre un roman de Stephen King (version jeunesse) et la série Stranger Things (2016), découvrez une bande d’amis en 1980 confrontée au Mal. Un condensé du meilleur de l’adolescence, avec la force de l'imaginaire, entre lumière et ténèbres face à des événements traumatisants portant les traits d’une légende urbaine, celle d’un croquemitaine au cœur d’un village de Bretagne. Une écriture maîtrisée, des virées nocturnes, des phénomènes surnaturels pour une intrigue de plus en plus oppressante et un final qui ne délivre pas toutes les réponses mais fait funestement écho à l’introduction du roman, narré par l’un des protagonistes devenu adulte et père.
Je suis ta nuit se révèle donc un roman divertissant, à partir de 13 ans bien que je pense qu'il ne faille pas le mettre entre toutes les mains.
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