Vincent Tassy, Diamants, Éditions Mnémos, collections Icares, 19 février 2021
4ème de couverture
D'un hiver sans fin naît l'espoir d'un printemps radieux
L'Or Ailé, de la cité immortelle, est descendu des cieux.
Seigneur ou roturier, lequel deviendra son suivant ?
Serviteur, conseiller, dévoué ou confident
Dans le labyrinthe d'Œtrange, il devra le guider
Du royaume de Ronces, aux Brumes emplies de danger.
De l'hiver au printemps, de l'obscurité à la lumière
Percerez-vous les secrets de L'Or Ailé venu sur Terre ?
Vincent Tassy portait en lui depuis longtemps ce roman de fantasy. Le résultat est à la hauteur du talent de cet écrivain singulier : sombre et lumineux, doux et violent, androgyne et sexué. Diamants est une œuvre gothique comme moderne, portée par l’une des voix les plus envoûtantes du genre.
Vincent Tassy est né en 1989 et vit en Savoie. Il élabore une oeuvre singulière et hypnotique, empruntant autant au fantastique qu’à la littérature classique avec des titres comme Apostasie et Comment le dire à la nuit. Il dirige aux Éditions du Chat Noir une collection consacrée à la réédition d’ouvrages oubliés du romantisme noir. Il est également musicien dans le groupe Angellore.
Avant-propos
Pour Diamants, le cinquième roman de Vincent Tassy, je n’ai qu’émerveillements à en dire. Je l’ai ressenti comme un condensé de tout ce que j’apprécie et qui me fascine toujours dans les textes de cet auteur. Les mises en abime, les légendes/mythologies, le mystère, le silence/le vide, les abysses, l’amour au-delà du corps, les lieux impossibles et enchanteurs, les fleurs et d’autres encore.
Diamants fut une lecture intense, envoûtante, fascinante, tragique, hallucinante aussi, tout comme douce, magique, merveilleuse et sublime… Ici, le qualificatif de sensoriel pour l’écriture de Vincent me paraît plus que jamais approprié.
Me reste à trouver les mots pour vous parler de ce véritable bijou pour lequel Vincent s’est encore surpassé.
Mots clefs
Fantasy – gothique – ange – diamants – lumière et ténèbres – magie – mémoire – mythes fondateurs – légendes – amours – lgbtqia – androgyne – désir – doux – violent – vide – silence – tragique – dévoration – folie – fleurs – personnages ambigus – reine – intrigue – désolation – symbolisme
Introduction
Tout d’abord je remercie infiniment Vincent et les Éditions Mnémos pour l’envoi de ce roman en service presse, reçu pour Noël 2020 avec carte, marque page, article-interview et pétales de papier ! Quelle joie de lire, enfin, le nouveau roman de Vincent, qui plus est en avant-première puisqu’il sort ce vendredi 19/02/21… !
Il y est des œuvres qui, une fois le dernier mot lu, une fois refermées, vous laissent le cœur exalté. Puis – ou bien est-ce en même temps ? – qui tissent un triste vide, celui de la séparation, déjà. Tels sont les romans de Vincent Tassy : des moments de lecture sublimés qui vous saisissent de vertiges encore longtemps après. Comme si vous flottiez quelque part entre le bord d’un gouffre abyssal et ses merveilleuses ténèbres qui vous appellent.
Magies et sortilèges sont sans doute à l’origine du talent de Vincent, sans doute, en effet, a-t-il été touché par les fées, mais cela, comme dans l’univers de ses textes, restera à jamais mystère et vérité enfuie…
Mon retour
Dès les premières pages, l’ambiance est posée. Une carte représente l’univers de Diamants, avec ses noms aux consonances gothiques et poétiques : Mer Diaphane, Chrysalie, Nymphée, Volutes… Ou encore Œtrange, capitale de Vaivre, là où cette formidable histoire commence.
Mauront, au don floral, est jardinier royal pourtant il rêve à autre chose, de la lumière et des scintillements de la cour, sans doute. Alors, lorsque que Dolbreuse, le mancien (comprenez mage ou magicien) de la Reine Alamasonthe, voit dans les fleurs et les reflets la descente imminente de L’Or Ailé, le jeune homme n’a plus qu’un désir, qu’une certitude : il sera le Laquais de l’Ange.
Toute la ville se met en mouvement pour aller accueillir L’Or Ailé. Dans les pages du Diadema (Bible des trois Continents) cependant, il n’existe qu’un infime fragment concernant l’Ange. Celui-ci va dormir, épuisé par son éreintant voyage, entouré d’or et de trésors et, à son réveil, il faudra qu’il élise son Laquais.
Parmi l’or, les fards, les étoffes, les sourires et la bienséance se révèlent déjà le désir des courtisan.e.s : briller. Ils veulent toujours briller plus, quitte à détruire. Dans ce monde qui n’est pas le sien, Mauront va, on s’en doute depuis le début, se retrouver auprès de L’Or Ailé, entre temps baptisé Avigdor. Un lien au-delà des mots et de l’amour va alors peu à peu se tisser entre L’Or Ailé et son Laquais.
Si déjà dans le Royaume aux couleurs rose poudré, lumière et chaos révèlent toute l’ambiguïté des personnages, le paradoxe et la complexité humaine, la nature humaine des autres Royaumes va venir s’insérer. Car un Or Ailé venu apporter abondance à un voisin ne peut qu’attirer l’envie et la convoitise, non ?
Chaque chapitre s’intéresse aux pas d’un personnage, créant une continuité dans la narration et l’intrigue très réussie, révélant d’autres personnages, d’autres endroits, d’autres points de vue. On le comprend très vite : aucun "camps" n’est plus blanc qu’un autre. Mais alors que les choses arrivent au point de non-retour (trahison, folie, fléau, alliance, non compréhension de L’Or Ailé…), la destruction prône d’un côté comme de l’autre. Amour dévastateur qui conduit à la folie la plus pure, conscience du néant, amour au-delà de l’amour, l’appel du vide : le carnage et le tintamarre prennent place sur le silence instauré depuis la descente de L’Or Ailé.
Entre divers déchirements, s’enchevêtrent à escient d’autres récits. Des mises en abyme relatant les mythes fondateurs des Trois Continents : les trois Anges Originels, leur descendance les Yahaloms, premier peuple sur Terre, la naissance de la première humaine… Des longs cheveux blonds de L’Or Ailé tombent des diamants, de même que le losange, pierre pure, à son front attirent tous les regards, il se pourrait bien que ces minéraux comportent plusieurs pistes et vérités enfuies sur l’Histoire. Dolbreuse met au travail l’Historiographe, de plus en plus convaincu que dans les livres d’Histoire et les mythes fondateurs, des faits et réponses aux épreuves qu’ils traversent s’y cachent. Lumineux, froids et minéraux comme Avigdor, les diamants sont souverains, mais qu’est-ce que cela signifie réellement ?
Il y 200 ans, sur les Trois Continents s’est abattu l’Évanescence : la disparition progressive de la magie. Celle-ci a pourtant perduré dans quelques Royaumes sans que personne n’ait jamais su l’expliquer. Confrontée à la menace de la Triade, à cause de laquelle Œtrange a rompu le Pacte, plongeant Vaivre dans le fléau, Savannah, l’une des Princesses part pour Ronces, Royaume inconnu, dangereux et mystérieux où la magie est la plus forte. C’est aussi sur ces terres à l’hiver perpétuel que son père a pris la fuite autrefois. Quant à Daphnéa, la flegmatique et effacée Princesse héritière, attirée de plus en plus par le vide et l’absence, elle aura aussi un rôle crucial. Pendant ce temps, la Reine Alasamonthe ne pense qu’à abandonner la couronne et partir voyager et le mancien Dolbreuse tente de palier au mieux l’étiolement de sa mancie. Car depuis l’apparition de L’Or Ailé, la mancie s’amenuise… Mais alors, d’où vient le don de Mauront, le Laquais, avec lequel il a su séduire Avigdor ?
Palais d’Œtrange, Ronces, Anthée, visions de Dolbreuse, voyage dans les Brumes, jardin fleuri, champ de bataille : entre lumière et ténèbres, grandiose et impossibilité, vertige et effroi, couleur et miasme, tragédie et poésie. Les mises en abyme et les différents personnages donnent à voir, à imaginer, des lieux impossibles et enchanteurs, vertigineux et hallucinants comme le sont les rêves et les cauchemars. Et, toujours, le silence qui guette, le vide abyssal du néant qui appelle et fascine. L’amour dévore et crée des monstres alors l’humanité brille de sa futilité. Dans ces décors, dans ce chaos, dans l’amour au-delà de l’amour, livré à sa folie et au néant, l’être humain pourtant prouve qu’il est sentiments bruts, voué à sa mortalité, à la fatalité ; lui restent les rêves et le vide.
En parlant de vide, les désirs des protagonistes sont mis en exergue dans Diamants. Et si le plus fort d’entre eux prenait réalité… ? après tout, nous sommes en présence d’un Or Ailé, créature incomprise. Alors les hommes s’affrontent et se détruisent pour cela : le désir, la royauté, briller. Briller comme les diamants et quoi après, et pour quoi ?
Au cœur de cette fresque de fantasy gothique, les sentiments et les émotions des personnages sont décuplés, les livrant à des forces au-delà de la chair. Des forces qui les font souffrir, qui les dévorent, qui les gèlent ou répandent en eux la lumière et le parfum de fleurs d’or et d’émeraude. Soi-même et l’autre : ou cela commence, ou cela termine lorsqu’on ne veut que se fondre en l’autre pour ne faire qu’un ? Cela fait écho à tant de mythes (on pense aux Androgynes de Platon) et cependant Vincent a fait le merveilleux choix de créer ses mythes et ses légendes pour l’univers de Diamants. Tel un William Blake inspiré par Tanith Lee et Léa Silhol, Vincent emprunte également au mythe de Narcisse (le miroir, les fleurs, l’ombre et le reflet). L’amour au-delà de l’amour, toujours.
Les sentiments magnifiés dans leur caractère brut, il y a également la douceur, la sensibilité, la bienveillance et la tolérance qui exsudent des pages. À Vaivre, aussi bien dans les mythes que dans le quotidien, les couples homosexuels sont égaux à ceux hétérosexuels. Des femmes occupent des postes de fonction haut placés, la Princesse Savannah ressemble à la Diane chasseresse de la mythologie grecque, des hommes sont androgynes et s’abandonnent à la mélancolie et à la rêverie plutôt que de gouverner… Voilà un ensemble hétéroclite, naturel et très plaisant que l’on découvre dans les pages de Diamants, tel un prisme reflétant les mouvements modernes.
Lumière et ténèbres, vide et destruction, oubli et chaos. La lumière, lénifiante, de L’Or Ailé que va-t-elle apporter au final ? Alors qu’un nouveau pan de l’Histoire s’écrit, les mémoires et ce que l’on croit savoir du passé, des mythes, sont remis en question. Pour autant, le chaos comme la lumière paraissent conduire à une forme d’obscurantisme… Ambigu, ni bon ni mauvais, tel est L’Or Ailé. Mystérieux et lumineux, impossible et pourtant là de chair et d’os alors que les hommes se déchirent pour briller et détruire.
Dans ce maelstrom de personnages, de décors, toute la magie de Vincent opère également à travers sa plume, avec son style reconnaissable parmi mille, son écriture sensorielle, sensible, douce et vibrante, convoquant le symbolisme. Les odeurs, les textures, les couleurs, les sensations, les sons (même l’absence de son) : tout se goûte, se touche, se (res)sent… Les couleurs sont poudroiements et scintillements ou miasmes, les regards et les gestes sont caressants, intimes, ils nous font nous-aussi trembler, les fleurs nous enchantent de leurs teintes, de leurs parfums, des légendes auxquelles elles sont parfois rattachées. Les lumières, du ciel, des bijoux, des diamants, des étoffes, des fleurs, de L’Or Ailé, des Brumes, des gemmes : elles nous émerveillent, nous fascinent, nous effraient, nous repoussent, elles glissent et chatoient sur nous comme sur le visage des protagonistes ; elles nous réchauffent ou nous gèlent. Les sensations provoquées à nos cinq sens nous montrent toute la pureté et le caractère brut de la nature, de la nature humaine ou autre. Nous en sommes percutés, hallucinés comme Savannah oubliant son nom au milieu du combat. Tout cela pour qu’à la fin, tout comme le passage de L’Or Ailé, demeure l’étrange et pourtant prégnante marque d’un rêve. Un merveilleux rêve qui nous marquera pour toujours.
En bref : précieux condensé du meilleur de Vincent Tassy, Diamants offre une fresque aux accents de fantasy et de gothique qui ne pourra que déposer sur vous l’empreinte d’un merveilleux songe. Vibrante de douceur et de magie, son écriture sensible et sensorielle nous entraine au cœur de sentiments et émotions bruts. Dans le vertige Vincent nous conduit, et dans le vertige il nous laisse. Criblés de toute part, entre lumière et ténèbres, nous aussi maintenant voyons le monde à travers un prisme. Les diamants sont souverains et il ne reste plus qu’à vous de vous plonger à votre tour dans la splendeur hallucinante de Diamants pour en saisir la signification ; au-delà des mots, au-delà de l’amour : la lumière, berçante, scintillante, éblouissante et vertigineuse.
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