La Bibliothèque du Manoir, collectif, Éditions Twinkle, Collection Counting Stars, 20 octobre 2022

Publié le par Maude Elyther

illustration et design de couverture par Lætitia Arnould

illustration et design de couverture par Lætitia Arnould

4ème de couverture

10 contes particuliers pour un automne victorien

Entrez dans la bibliothèque du manoir ! Elle regorge de récits d’un autre temps, d’un autre lieu, d’un autre monde… Des histoires envoûtantes, oniriques, empreintes de mystère ou de mélancolie, parfois décalée, tantôt à l’humour sombre ou à l’émotion palpables ; des histoires étranges, fascinantes et toujours particulières…

Avec les contes de :

Ellie S. Green

Laetitia Arnould

Johanna Marines & A.J. Twice

Nancy Guilbert

Camille de Montgolfier

Jennifer Tellier

Jeremy Angelo

Sacha Bazet

Livia Meinzolt

Karine Martins

Avant-propos

Imaginez être projeté.e, la soir dans un manoir victorien, en octobre, la saison des sorcières. Vous êtes convié.e à la bibliothèque où brûle un accueillant feu de cheminée, où des canapés ou méridiennes confortables vous attendent, vous prendrez bien un thé ou une tisane avec quelques biscuits – alors que la pluie ou l’orage gronde dehors – ? Soyez lae bienvenue ! Chaque soir, un conte vous sera conté, dans cette bibliothèque hors du temps. Un conte particulier, onirique, merveilleux, gothique, mais toujours étrange car teinté par les lumières et les ombres automnales.

Via une campagne Ulule, les Éditions Twinkle nous offre une anthologie qui regroupe des 12 auteurices que les éditeurices apprécient et auxquel.le.s ils ont proposé d’écrire un conte particulier victorien et automnal. L’objet-livre se révèle une merveille, dans son format relié collector, sa reliure cousue, ses marquages à chaud or, son signet satin. L’ouvrage comporte également une illustration pleine page noir et blanc pour chaque nouvelle, réalisées et designées par Lætitia Arnould.

Si vous aviez manqué la campagne Ulule, pas de panique, ce somptueux recueil est désormais disponible sur la boutique en ligne des Éditions Twinkle ; il est sorti officiellement ce 20 octobre et bénéficie actuellement d’une grande lecture commune (rendez-vous sur la page Instagram de la maison d’édition pour en savoir plus !)

Dans cet article, je vous présente chacun des contes, que j’ai lu dans l’ordre, étant donné qu’ils sont ponctués par des préambules signés Lætitia Arnould, nous conviant dans la chaleureuse bibliothèque du manoir où chaque conte commence.

Mots clefs

Anthologie – recueil de nouvelles – contes – contes automnaux – young adult – époque victorienne – automne – fantastique – poétique – onirique – étrange – mélancolie – mystères – manoir – bibliothèque – humour noir – allégorie – aventures – enquête – souvenir – spiritisme – malédiction – Petit Peuple – créatures surnaturelles

La Bibliothèque du Manoir, collectif, Éditions Twinkle, Collection Counting Stars, 20 octobre 2022

1ère immersion

Freak Show, Ellie S.Green

Mots clefs : fantastique – orphelin – mort – Freak Show – monstres – illusion – fantômes – secret – libération – fuite

Dans un orphelinat, pour venger son plus jeune camarade traumatisée par la directrice, Elliot provoque malgré lui un terrible incendie. Alors que l’on lutte contre le feu, il entend qu’un garçon manque à l’appel… Obnubilé par la pensée d’avoir tué le jeune Todd, Elliot fuit pour s’éloigner de la ville de Sheffield. Les pieds nus et glacés, il va croiser le chemin d’une troupe itinérante de « freaks ».

Il trouve refuge au sein du Freak Show. Toutefois, la mort de Todd le hante, si bien qu’il a en permanence froid, comme glacé par le fantôme du jeune garçon, persécuté par l’idée d’être retrouvé par les forces de l’ordre. Car il est un incendiaire et un meurtrier.

S’il tait son nom et sa ville d’origine aux « monstres » avec lesquels il cohabite, Elliot va être confronté à l’étrange : cauchemars ou réalité ? Les « freaks » lui cache quelque chose, mais quoi ? Que vont-ils faire de lui ? Dans un univers glacé comme le corps d’Elliot, les lumières et la chaleur du Freak Show touchera-t-elle le garçon, ou n’est-ce qu’une illusion de plus ? Les réponses doivent venir de lui s’il veut se libérer.

Un conte automnal au souffle glacé, où la réalité n’est pas toujours celle que l’on pense. Si les « freaks » savent faire preuve de bienveillance, contrairement aux humains qui sont les véritables monstres de ce récit, quel secret gardent-ils ? Le jeune Elliot, incendiaire et meurtrier en fuite qui a trouvé refuge dans la troupe itinérante va devoir trouver les réponses lui-même ; et peut-être trouvera-t-il, plus que la liberté, la libération.

De la même autrice, vous aimerez également Trölls, un conte qui revient sur l'origine des lutins de Noël, illustré par Lisa Guisquier, aux Éditions Gulf Stream.

La Bibliothèque du Manoir, collectif, Éditions Twinkle, Collection Counting Stars, 20 octobre 2022

2ème immersion

Le Souffleur de Lumières, Lætitia Arnould

Mots clefs : allégorie – nuit – ténèbres cruelles – lumières – violon – la petite fille aux allumettes – légende urbaine – gothique

Dans la ville de Londres, une créature rôdait la nuit : dès les coups de minuit, elle pourfendait les rues, appâtée par les lumières, qu’elles soient chandelles, cierges, lanternes… Attirée comme un papillon nocturne par elles, ce sombre personnage n’avait qu’une obsession : les éteindre. Nuit après nuit, cette légende urbaine plongeait les quartiers dans les ténèbres cruelles. Des orphelins mourraient de froid, des gens se perdaient, devenaient fous. Mais peu lui importait, William Midnight ne songeait pas à tout cela : si une fenêtre était cassée, une porte mal fermée, il s’engouffrait et faisait son œuvre.

Cruauté ? Le fond de William n’est pas aussi noir pourtant. Car c’est la nuit qui le consume de l’intérieur lorsque sonne minuit, de ce fait il n’est plus qu’un être primal obsédé par les lumières. Il doit toutes les éteindre avant la venue de l’aube. Or, il lui arrive de lutter de brefs instants, et d’épargner quelques lumières, bien que jamais deux fois la même.

Une nuit, une lumière lui échappe, s’était cachée dans le fog. Une autre, les pleurs d’un violon ont un curieux effet sur lui et il s’intéresse à une jeune orpheline dont il n’éteint pas la lanterne. Mais il la revoit, et souvenez-vous : William Midnight n’épargne jamais deux fois la même lumière.

Jamais ?

Déroulant les nuits automnales londoniennes, ce conte d’apparence cruelle présente une réécriture de La petite fille aux allumettes, mettant en scène William Midnight, le Souffleur de Lumières. Au sein des nuits sombres et cruelles, la lumineuse Swann touchera-t-elle le cœur de cette créature maudite ?

Ce conte est également une allégorie du passage à la modernité, avec l’installation de l’électricité : l’humanité sort des ténèbres. Et par là, les créatures de l’ombre deviennent légendes urbaines puis mythes.

Vous aimerez aussi Là où réside l'hiver, de la même autrice, dans un somptueux écrin, aux mêmes Éditions Twinkle.

La Bibliothèque du Manoir, collectif, Éditions Twinkle, Collection Counting Stars, 20 octobre 2022

3ème immersion

Le Bourreau des cœurs éplorés, Johanna Marines & A.J Twice

Mots clefs : humour noir – humour décalé – veuve – luxure – meurtres – amour fou – folie – la Mort – cynisme

La particularité de ce conte est d’avoir été écrit à 6 mains ! Vous aimez le cynisme, l’humour décalé, noir ? Alors venez faire la connaissance de Ivy Lunacy, la veuve la plus connue pour le nombre incroyable de mariages et de funérailles qui la font connaître par cœur le chemin de l’église au cimetière.

Lors de la mort accidentelle de son premier mari, un radin qui n’avait consenti à embaucher comme domestique qu'une seule cuisinière trois ans après les plaintes et remontrances de Ivy (vous vous rendez compte !), la Mort apparaît pour venir chercher l’âme du défunt encore chaud et s’occuper de la veuve. Car la Mort, Mr Heartless, est un adonis qui vient chercher luxure auprès des veuves, pas si éplorées que cela dès qu’elles posent les yeux sur lui.

C’est le coup de foudre pour Ivy, qui fera tout pour revoir son amant. En effet, un contrat oral (le « oui » des veuves suffit) offre quelques heures, celles d’un sablier, de la compagnie de la Mort aux veuves. Or c’est l’amour fou pour Ivy et quand j’écris qu’elle est prête à TOUT pour le revoir, vous n’êtes pas au bout de l’humour du trio d’auteurices.

Ivy est détestable, capricieuse, naïve, mais follement amoureuse. La Mort a beau se moquer d’elle à renfort de fleurs qu’il lui laisse après leur nuit d’ébats – elle ignore le langage des fleurs –, même lui va devoir puiser dans ses ressources pour ne plus la voir ! Si vous avez un peu cerné le personnage à travers ces lignes, vous comprendrez que Ivy n’a pas dit son dernier mot…

Un conte hilarant qui retrace la folie amoureuse d’une femme pour la Mort lui-même, cet adonis venant trouver luxure auprès des veuves, sous les yeux morts des maris au corps encore tiède. Si Ivy ignore le langage des fleurs, son prénom est parfait : « Ivy » signifie lierre, cette plante qui étouffe. Le jeu du chat et de la souris initié entre Ivy et Mr Heartless est truculent, les jeux de mots, hilarants. Mais, au final, qui sera berné.e ?

Jennifer Twice par Kévin Balboa, pour la promotion de la nouvelle "Le Bourreau des cœurs éplorés"

Jennifer Twice par Kévin Balboa, pour la promotion de la nouvelle "Le Bourreau des cœurs éplorés"

La Bibliothèque du Manoir, collectif, Éditions Twinkle, Collection Counting Stars, 20 octobre 2022

4ème immersion

Sa voix au-delà des voies, Nancy Guilbert

Mots clefs : fantastique – rêve d’écrivain – meurtrier – écrivains connus – ligne de chemin de fer – dénoncer – fantôme

Romane, fille modeste éprise de l’écriture, part séjourner chez son parrain, un riche industriel. Si dans un premier temps elle est ravie de changer de décor, elle va vite se rendre compte que son parrain profite de l’utiliser comme faire valoir, d’autant plus avec l’inauguration d’une ligne de chemin de fer. De plus, Romane a d’étranges impressions, puis, alors qu’elle a entendu l’histoire d’un meurtrier qui rode, elle se fait agresser. C’est à bord du train que les événements s’intensifient.

L’assassin est-il le garçon qu’a connu Romane et qui la terrifiait au point qu’elle songe encore à lui ? Cela expliquerait pourquoi il s’en prend à elle, à moins que ce ne soit tout autre chose...

Dans le sillage aisé de son parrain, la jeune fille ne se sent pas à sa place, d’autant plus que la pauvreté règne dans les rues. Et c’est ce regard que Romane porte, critique, qui contribue à son rêve : écrire des livres.

Bien sûr, cette activité est mal vue par sa mère, qui le lui interdit même. Mais alors qu’elle évolue dans le sillage mondain, des rencontres avec des noms connus vont la conforter. Toutefois, elle n’est pas encore au bout de ses peines, car pour réaliser son rêve, il lui faudra survivre au voyage dans le train. Sera-t-elle assez courageuse pour saisir la vérité ?

Ponctué d’extraits d’écrits d’Emily Jane Brontë, ce conte dresse le portrait d’une jeune fille qui va se battre pour réaliser son rêve, celui de devenir écrivaine. À une époque où cela est mal perçu, où certaines femmes signent sous un pseudonyme masculin pour contrer cet obstacle. Dans un monde qui n’est pas le sien, Romane aiguise son regard critique, prête à découvrir la vérité, quitte à tenir tête à l’étrange meurtrier qui sévit et qui a décidé de s’en prendre à elle.

Vous aimerez aussi La Forêt des Araignées Tristes de Colin Heine, aux Éditions ActuSF.

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5ème immersion

La Fabrique Mécanique, Camille de Montgolfier

Mots clefs : steampunk – automates – inventeur – révolte – robotisation – modernisation

Suite à son internat dans une pension britannique, le jeune Édouard-Louis monte à bord du Transeuropéen pour rentrer chez lui, amené à succéder son père, le maire de Beaumont. Au cours du voyage, il va sympathiser avec Helena, une jeune femme aventurière. Durant leurs échanges, Édouard-Louis va lui raconter la fabuleuse particularité de Beaumont : la création d’automates a simplifié la vie des habitants. Intriguée, Helena décide de faire une halte à Beaumont avant de reprendre son propre voyage.

Leur arrivée à Beaumont ne va pas se passer comme prévu. En effet, durant l’absence d’Édouard-Louis, les automates se sont révoltés. Ils quadrillent désormais les rues, ayant imposé des règles strictes quant aux sorties des habitants. Ceux qui n’obéissent pas sont emprisonnés, tandis que les autres vivent dans la peur constante et doivent réapprendre des savoirs comme pâtisser pour la boulangère, tâche qui était réalisée par des automates.

Affligé par la situation, Édouard-Louis décide d’agir, et Helena tient à l’aider. Ainsi, ils découvrent quel l’automate originel est à l’origine de cette révolte. Il s’agit de la poupée d’Édouard-Louis, Cora, sur laquelle l’inventeur a mené des modifications. Alors que les deux amis mettent au point un plan pour rencontrer Cora et la « réinitialiser », dans les rues, les habitants, ragaillardis par le retour d’Édouard-Louis, prennent les armes. L’affrontement entre humains et automates se déchaîne, tandis que Helena va découvrir auprès de Cora la vérité sous l’aspect manichéen des événements.

De prime abord, ce texte est plus « jeunesse » que les précédents, toutefois plusieurs éléments apportent des réflexions qui ont permis de renverser le manichéisme. Camille de Montgolfier instaure une réflexion sur la robotisation, notre rapport à cette modernisation qui nous fait perdre certains savoir-faire (comme la boulangère a dû apprendre à pâtisser), l’égocentrisme humain qui se croit encore et toujours supérieur. La nouvelle aborde également une obsession malsaine.

La rencontre inattendue entre Édouard-Louis, qui s’en revient chez lui, à Beaumont, avec Helena va lui sauver la vie et même lui donner un réel sens. Car la ville dite merveilleuse du fait de l’emploi d’automates a vu sa situation être renversée : les automates se sont révoltés et ont pris le contrôle. Le manichéisme plus naïf de ce texte se renverse via des réflexions sur la robotisation et grâce au personnage de Helena qui fera évoluer l’esprit et les aspirations d’Édouard-Louis.

Vous aimerez aussi Le Club des Érudits Hallucinés de Marie-Lucie Bougon, aux Éditions du Chat Noir.

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6ème immersion

East End, par Jennifer Tellier

Mots clefs : créatures surnaturelles – meurtres – imaginaire – folie – cauchemars – solitude – amis imaginaires – bas-fonds londoniens – alcoolisme

Stanley arbore sa vie, et ce bien qu’il ait tout pour être heureux : il vient d’une famille aisée, des domestiques s’activent dans son sillage. Mais voilà, il se sent très seul : sa mère décédée en couche, son père très distant et qui veut le forger selon l’image du parfait homme (bien éduqué, faisant un bon mariage, perpétuer la lignée…). Stan est en décalage par rapport à tout cela. D’ailleurs, il préfère se soûler avec des amis ouvriers dans les bas-fonds de Londres les samedis soir, faisant le mur en mentant à son père.

Depuis quelques temps, le jeune homme est la proie de cauchemars, c’est aussi pour cela qu’il s’enivre énormément : pour dissoudre ces horreurs nocturnes. Entre ce fait et ses amis imaginaires qui refont surface, comment cacher sa folie imaginative ? Car ces farfadets, faës et autres dragonnets, lui-seul les voit. Si autrefois ces créatures étaient une présence chaleureuse et réconfortante dans sa solitude, les amis imaginaires ne devraient plus être alors qu’il a désormais dix-sept ans, qu’il est adulte, n’est-ce pas ?

Tiraillé entre tout cela, Stanley ignore Drake, le farfadet, qui vient le solliciter. Ne l’écoutant pas, quelques mots parviennent tout de même au cerveau du jeune homme : « meurtres », « besoin de ton aide ». Alors, quand Stan finit par écouter Drake, et que ses propos se relient à la une des journaux qui parlent d’ignobles meurtres, où se situe la frontière entre la réalité et la folie ?

Je n’en dirai pas plus sur cette nouvelle très originale ! L’ombre d’un certain meurtrier célèbre plane, toutefois l’autrice nous régale en introduisant le Petit Peuple, un questionnement sur l’imaginaire et la folie. Ami imaginaire, conscience, ou tout simplement être surnaturel, Drake le farfadet apparaît de nouveau à Stanley, lui demandant son aide pour enquêter sur des meurtres horribles qui touche les faës et autres créatures. Entre ces cauchemars sanglants, son alcoolisme pour les ignorer, la figure austère et pesante de son père, le jeune Stan aidera-t-il ses amis, qu’ils pensent nés de son imaginaire ?

Vous aimerez aussi la saga Les extraordinaires et fantastiques enquêtes de Sylvo Sylvain de Raphaël Albert aux Éditions Mnémos.

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7ème immersion

L'Amphitryon, Jeremy Angelo

Mots clefs : 31 octobre – hospitalité – conversation – fantastique – nourriture

À Manchester, il est bien connu qu’Octave de Cielmonde offre l’hospitalité. En échange de votre conversation, vous vous régalerez de merveilleux mets. On surnomme Octave l’Amphitryon pour cela. Toutefois, certains rapportent d’étranges faits : un s’est senti très mal à l’aise durant son repas chez Octave de Cielmonde, il raconte même que son hôte ne mangeait pas, que les assiettes et les verres se remplissaient d’eux-mêmes… D’autres sont heureux de manger avec l’Amphitryon, aimant débattre avec lui sur bien des sujets.

Octave de Cielmonde se nourrit-il des conversations de ses visiteurs ? Lui qui ne semble pas manger alors qu’il est très maigre ? Ou bien ne sont-ce là que des rumeurs qui circulent ? Toujours est-il que si la maison accueille toute l’année n’importe qui, il est bien connu que le soir du 31 octobre, l’Amphitryon ne reçoit personne.

Justement, voilà le jour du 31 octobre, et Octave de Cielmonde s’enfonce dans sa solitude, les minutes égrenées par le tic-tac du pendule. Ce jour-là, un visiteur sonne à sa porte, un jeune homme gras à la logorrhée bien pendue. Il se montre hautain et menteur, toutefois Octave ne dit rien, laisse faire et apprécie même son répondant lors de leurs débats.

Seulement, les heures passent, la nuit tombant à l’heure du thé à cette période de l’année. Octave de Cielmonde n’ose pas mettre à la porte son visiteur ; celui-ci ne sait-il pas qu’il ne reçoit pas le soir du 31 octobre ? La nervosité gagne l’hôte, qui remarque que son visiteur commence à bouder certaines victuailles…

Que se passe-t-il dans cette maison le soir du 31 octobre ? Ce visiteur bien impoli pourrait bien l’apprendre…

L’Amphitryon est un conte de pur fantastique, distillant petit à petit des étrangetés dans un quotidien normal. Dès le début, nous nous interrogeons sur le mystère qui, tel le fog se répandant dans les rues, entoure la nuit du 31 octobre chez Octave de Cielmonde, le bon samaritain dont la porte est ouverte à tous pour partager un repas. Est-il vrai que ce bienfaiteur ne mange pas de nourriture, mais semble plutôt se nourrir des conversations de ses visiteurs ? Un inconnu très impoli s’invite chez lui le jour du 31 octobre, et tandis que les heures passent, la nuit tombe…

Vous aimerez aussi le premier roman fantastique de l’auteur, Minuit sur Domme, aux mêmes Éditions Twinkle.

La Bibliothèque du Manoir, collectif, Éditions Twinkle, Collection Counting Stars, 20 octobre 2022

8ème immersion

Vous montez, mademoiselle ? Sacha Bazet

Mots clefs : fantastique – trains – histoires de famille – aventures – carnet – mystère – fantômes

En feuilletant La Bibliothèque du Manoir, j’ai reconnu la nouvelle des deux acolytes Sacha Bazet par le biais de la mise en page, car ils ont repris le procédé de la double narration qui m’avait beaucoup plus dans leur roman Ce qui nous hante.

Avec leur nouvelle, le duo nous entraîne dans les pas de la jeune Gabrielle, qui découvre la terre d’origine de sa famille paternelle, dans les Alpes. Ce voyage est causé par le décès de la tante de son père qu’elle ne connaissait pas. Si cette escapade est bienvenue pour elle, qui échappera ainsi aux mondanités pendant une semaine, sa mère est quant à elle contrariée, son père, songeur, et l’intendante, Henriette, encore plus austère que de coutume.

Sur place, au manoir qui était un sanatorium dirigé par la tante Adélaïde, une vieille fille comme sa mère ne veut pas qu’elle devienne, Gabrielle seconde Henriette pour faire le tri des affaires. Elle découvre alors des malles poussiéreuses dont l’une porte le nom de la famille, une certaine Jeanne dont elle n’a jamais entendu parler. Parmi les vêtements, elle trouve un carnet ayant appartenu à cette parente étrangère. Interrogeant sa mère à son propos, celle-ci lui fait jurer de ne pas en souffler un seul mot à son père. Contrariée, car sa curiosité est grande, Gabrielle promet.

Mais elle a caché le carnet, et commence à le lire en cachette. Elle y découvre alors une jeune fille qui lui ressemble pour son caractère fantasque, bien que difficile, qu’elle ne musèle pas comme Gabrielle. Ses parents s’en étaient débarrassée en l’envoyant au Sanatorium de sa tante Adélaïde. Elle y séjournait avec « Paupiette » et « Merlu », demi-frère et demi-sœur qu’elle a appris à mieux connaître et à apprécier la compagnie au cours de leurs aventures.

Les pages du carnet sont mises en page dans le recueil, aussi nous découvrons en même temps que Gabrielle les fantaisies de Jeanne. Fantaisies car la jeune fille évoque des trains et des personnages fabuleux, comme Monsieur Luc, son sifflet au cou, qui fait les cent pas sur le quai qui n’est plus utilisé depuis un terrible accident qui a précipité un train dans le vide…

Malgré tout, Gabrielle est persuadée de la véracité des aventures relatées par cette parente inconnue au bataillon. Elle enquête donc, pour en apprendre davantage sur Jeanne, ce qui la fera se rapprocher d’une personne de son entourage. Cette dernière souhaite lui faire oublier toutes ces histoires de trains, affirmant que Jeanne souffrait d’une maladie mentale. La réalité et l’imaginaire se mêlent, traçant les parcours de Gabrielle et de Jeanne, si semblables. Le destin de Jeanne changera-t-il la vie de Gabrielle ?

J’ai adoré ce conte ! Le récit propose différents niveaux de lectures, de quoi interroger sur la réalité et l’imaginaire, surprendre, conforter ou encore faire courir à perdre haleine à la suite de Gabrielle ou de Jeanne, à l’assaut du chemin menant à la gare officiellement abandonnée. Découvertes, aventures, amitié, désir de liberté, émancipation… Un beau mélange qui vous fera rêver à votre tour d’aventures !

Vous aimerez aussi, des mêmes auteurs, leur premier roman, Ce qui nous hante, aux Éditions Mnémos, label Naos.

La Bibliothèque du Manoir, collectif, Éditions Twinkle, Collection Counting Stars, 20 octobre 2022

9ème immersion

Un Songe d'automne, Livia Meinzolt

Mots clefs : manoir – malédiction familiale – maladie étrange – superstitions

Aux dires des superstitions, la famille Gray est maudite : les garçons sont touchés par un mal étrange et ils meurent tous l’année de leurs 18 ans. Abigail ne croit pas à cette histoire de malédiction, elle aime même aller contempler le manoir familial, finissant par rencontrer Gabriel Gray. Ils se lient d’une amitié secrète, Gabriel lui donnant goût à la poésie, à la lecture. Un jour, Abigail se voit éloigner de son ami par la nécessité de se rendre dans une autre ville pour travailler. Elle écrira à Gabriel, jusqu’à arrêter car il ne lui répondra jamais.

Trois ans passent, jusqu’à ce qu’Abigail découvre une annonce dans le journal : un travail au manoir des Gray. Contre l’avis de tous, elle s’y rend. Elle découvre que le mal étrange qui plane sur les descendants mâles de la famille s’est abattu sur Gabriel. Son rôle consistera à rester près de lui, à lui faire la lecture.

Entre superstition et maladie étrange et incurable, la jeune fille se décide à enquêter sur l’origine de ce mal. Car le temps de Gabriel est compté : il trépassera le 31 octobre. À quel mal, quelle force, quelle créature se confronte Abigail – bien décidée à sauver son ami – ? Elle-même sombre dans les cauchemars et des répercutions physiques tentent de la dissuader de poursuivre plus avant son objectif. La solution réside-t-elle dans le passé de la famille Gray, à l'événement qui a précipité cette malédiction ? Gabriel, si angélique et doux, ne mérite pas ce funeste sort.

Dans le manoir des Gray, où le temps semble s’être figé, la jeune Abigail va tout mettre en œuvre pour sauver son ami Gabriel, atteint d’un mal étrange ou d’une malédiction ancestrale selon les rumeurs superstitieuses. Elle doit trouver l’origine du mal qui consume Gabriel pour le sauver, à moins que cela ne soit pas la solution… Mais le temps presse, son trépas est annoncé pour le 31 octobre…

Vous aimerez aussi Les Amoureux de la Lune de mon amie Lizzie Felton, aux Éditions du Chat Noir.

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10ème immersion

La boutique de souvenirs d'Isadora, Karine Martins

Mots clefs : spiritisme – souvenirs – esprits – course contre la montre

Ayant perdu son emploi, William se rend à l’adresse donnée par un inconnu : La Boutique de souvenirs d’Isadora cherche un homme à tout faire. Sur place, il se rend compte que « boutique » n’est pas un mot qui convient au commerce d’Isadora puisqu’elle ne vend rien. Sont-ce des boules de cristal qui tapissent les étagères ? A-t-il affaire à une voyante ?

Peu enclin à tout ce qui s’apparente au spiritisme, William est désarçonné lorsqu’Isadora lui demande de l’accompagner dans le quartier le plus malfamé car elle doit apporter un cadeau à quelqu’un. Il la suit alors. Isadora et son garde du corps improvisé se retrouvent chez une mère sans nouvelle de l’un de ses enfants depuis un an. La commerçante dit que celui-ci lui a laissé quelque chose pour elle. Elle sort alors d’une de ses boules de cristal. La famille du disparu est hypnotisée et retrouve un souvenir joyeux. William quant à lui, ne voit rien.

De retour à la « boutique de souvenirs », Isadora lui donne quelques informations. Elle récolte les souvenirs que les esprits lui laissent, le 31 octobre, lorsque le voile est le plus mince entre notre monde et l’autre. Elle doit alors les mettre de côté pour les restituer aux proches concernés. Elle les place donc dans les contenants que William prenait pour des boules de cristal. Mais son travail ne s’arrête pas là : les esprits ne lui fournissent aucune information. Aussi il lui faut du temps pour trouver dans les souvenirs des éléments qui lui permettent de retrouver les personnes à qui offrir le souvenir.

Elle étudie justement le souvenir qui s’est accroché à William. Le derniers souvenir d’une fillette, affamée dans une cave. Une autre petite apparaît dans la vision. Isadora demande à William de l’aider à trouver cette seconde fillette, elle est en grand danger de mort.

Son homme à tout faire du soir croit plus à la folie d’Isadora qu'à ce qu’elle raconte à propos des souvenirs, après tout, lui ne voit rien. Il prend congés.

Toutefois, tout cela ne le laisse pas en paix, il décide de retracer les pas de la soirée passée avec Isadora. Un fait étrange se produit : la mère et ses enfants qu’ils ont visité la veille ne le reconnaissent pas. Mais lorsqu’il évoque le souvenir heureux rendu, il découvre que ce dernier a regagné leur esprit à ce moment. Il repense à la fillette décrite pas Isadora. Il est encore temps de la sauver.

Entrez dans La boutique de souvenirs d’Isadora ! Elle a grand besoin d’aide pour recueillir les souvenirs que lui laisse les esprits pour qu’elle les apporte à leurs proches. Alors que William tente sa chance pour être embauché comme son homme à tout faire, l’un des souvenirs les entraîne dans une course contre le temps pour sauver une vie.

Vous aimerez aussi, de la même autrice, la série Ceux qui ne peuvent pas mourir, aux Éditions Gallimard Jeunesse.

La Bibliothèque du Manoir, collectif, Éditions Twinkle, Collection Counting Stars, 20 octobre 2022

En conclusion

Les Éditions Twinkle proposent une somptueuse anthologie, tant sur le fond que sur la forme, très soignée. Vous aimez les manoirs, les contes, l’automne, l’époque victorienne, les mystères, les histoires de fantômes – et j’en passe – ? Alors vous devriez vous pencher sur ce recueil de contes. 13 auteurices sélectionné.e.s ont travaillé pour proposer 10 textes particuliers, fantastiques avec pour thématique de se dérouler en automne, à l’époque victorienne.

Si l’ombre du malheureusement célèbre tueur de Whitechapel plane à plusieurs reprises, les récits sont très variés au niveau du genre, des thématiques. Bien sûr, il y a des manoirs, des gens aisés, mais les bas-fonds ou encore le désir d’émancipation des jeunes gens nuancent certains décors ou situations de départ. Aventures, enquêtes, découvertes, Freak Show, humour noir… : un large panel entraîne les lecteurices dans les ombres et les lumières de l’automne, les mêmes que celles de l’âme humaine…

Vous verra-t-on ce soir dans la Bibliothèque du Manoir ?

https://twinkle-editions.com/accueil/32-la-bibliotheque-du-manoir.html

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