Nora Lake, Des cendres sur tes mains, Éditions Hurlevent, 14 décembre 2022

Publié le par Maude Elyther

source : https://editions-hurlevent.myshopify.com/products/des-cendres-sur-tes-mains-par-nora-lake)

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4ème de couverture

Angleterre, fin XIXe. Une jeune orpheline recueillie par un étrange tuteur. Un manoir lugubre prenant racine au cœur de la forêt. Des amours scandaleuses. Des portes qui s’ouvrent et d’autres qui restent closes. Une partie d’échecs qui s’éternise.

Au-delà des apparences, la danse peut s’avérer macabre…

Avant-propos

Nora et moi avons noué contact via notre amour pour les romans gothiques et en particulier ceux de Vincent Tassy. Nous nous sommes vite rendu compte que nous écrivions et lisions sur des thématiques similaires, alors je ne pouvais manquer son premier roman ! XIXème siècle, un manoir aussi mystérieux et sombre que son propriétaire, le tuteur de la jeune narratrice, des amours interdites, la menace de la forêt… Nora propose un ouvrage inspiré de l’excellent film Crimson Peak de Guillermo del Toro, pour un récit toxique, malsain, empreint de luxure.

Mots clefs

Gothique – 19ème siècle – amours interdites – luxure – fantastique – spiritisme – manoir – solitude – désir féminin – drame – suicide – jalousie – fantômes – histoire de fantômes – monstruosité

Trigger warning

Suicide, violence, scènes de sexe, sang

illustration réalisée par Mrs. Steamcloudy, sous forme de carte, conçue pour Des cendres sur tes mains

illustration réalisée par Mrs. Steamcloudy, sous forme de carte, conçue pour Des cendres sur tes mains

Mon retour

Des cendres sur tes mains est narré à la 1ère personne, par Alice, adolescente orpheline au début du récit. À l’orphelinat, son amitié exclusive avec Lizzie, son amour pour les romans d’amour comme Orgueils et préjugés, ou encore son rapport trouble au spiritisme marquent sa personnalité. Lorsqu’un hasard de circonstance fait apparaître un tuteur dans sa vie, elle est contrainte d’aller le rejoindre dans son manoir perdu en pleine forêt. Accablée par sa séparation avec Lizzie, elle ne parvient à s’enthousiasmer comme son amie à envisager que la vie de ses héroïnes préférées lui ouvre les bras. La richesse, les bals, un merveilleux mari…, tout cela lui est plus abstrait que jamais. D’autant plus que c’est la solitude qui l’attend au manoir : une maison lugubre, un tuteur absent.

Pire que tout, ce sont les portes qui s’ouvrent et se claquent sans raison, les courants d’air, les présences invisibles dans le sillage d’Alice qui l’effraient le plus. Des bougies qui s’éteignent toutes seules, des rêves abominables. Ce n’est pas un euphémisme de dire qu’elle est loin d’être accueillie les bras ouverts. Pourtant, les années passent ; Alice apprécie grandement l’un de se professeurs qui l’instruit à domicile, elle prend goût à des lectures controversées (Frankenstein de Mary Shelley, puis les ouvrages du marquis de Sade). Son amitié avec Lizzie s’arrête, mais elle trouve une meilleure amie en la présence de sa nouvelle dame de chambre, la belle Annabel. Et, alors qu’elle a désormais 16 ans, son tuteur lui témoigne enfin de l’intérêt.

Isaac Edwards, médecin sans cesse en déplacement, initie le rituel du jeu d’échec : lui et sa pupille se retrouvent le soir pour une partie. Si Alice s’étonne de prime abord de ce soudain revirement chez son tuteur à son égard, sa fascination pour l’homme l’emporte. Entre eux démarre une danse toxique. Alice est aux prises de son désir qui grandit, de la jalousie qui la consume, de la solitude qui la tenaille malgré le rapprochement de Mr Edwards et la présence d’Annabel.

Nous ne sommes pas face à une jolie ou mignonne histoire d’amour, non. L’atmosphère est malsaine, toxique, accentuée par le fait qu’Alice ne le perçoive pas, cramponnée qu’elle est à l’impériosité du désir puis bientôt de la luxure. La jeune femme est fascinée, obsédée, tant par le mystère ambulant de son tuteur, qui porte un masque sur la moitié de son visage, que par Annabel ou encore Edelweiss, l’épouse d’un bon ami de Mr Edwards, un individu au demeurant très malaisant, un pervers narcissique.

En parallèle, des fragments s’intervertissent aux chapitres narrés par Alice. Sans temporalité précisée, nous suivons les pas d’une autre jeune femme : amitié, amour, drames. Le miroir entre ces deux figures féminines trouvera une issue très malsaine. Je le répète, tout ici est toxique, trouble, sombre, torturé, même avec des personnages comme Annabel ou Edelweiss. Pris dans cette atmosphère suintante et étouffante, nous sommes sur les pas d’une histoire de fantômes. Et qui dit fantômes, dit drames, folie, passion.

L’ensemble avait tout pour me plaire, mais malheureusement j’émets quelques réserves… L’écriture est trop lisse, même dans ses passages les plus sombres et violents. Je pense que le récit méritait une touche plus soutenue d’étrangetés fantastiques ; au final ce ne sont que des bruits, la sensation d’une présence qui se perdent dans les préoccupations du désir d’Alice. La narration à la première personne gomme, il me semble, les effets du fantastique. Surtout, le récit est fortement inspiré de Crimson Peak, film que j’adore, aussi ai-je été frustrée par le nombrilisme d’Alice, trop centrée sur la luxure que réellement par les mystères et secrets que renferment le manoir.

Ce roman se lit toutefois facilement et rapidement. Et il a le mérite de faire ouvrir les yeux à l’héroïne quant à son histoire d’amour. Nous sommes plus dans Barbe Bleue que La Belle et la Bête en somme, avec des personnages fracassés par la passion amoureuse et/ou la luxure.

En bref : Nora Lake signe ici son premier roman, un ouvrage gothique se déroulant au XIXème siècle, sous fond de drames, de relations toxiques et sombres. Ne vous y trompez pas, nous sommes plus dans Barbe Bleue que La Belle et la Bête, avec des personnages fracassés par la passion amoureuse et/ou la luxure. Un récit poisseux sur lequel j’émets quelques réserves : une écriture trop lisse, le nombrilisme de l’héroïne, une intrigue qui passe un peu au second plan à cause de l’excès de luxure.

J’ai hâte de découvrir l’évolution des écrits de Nora, car l’on sent ici un potentiel qui ne demande qu’à s’affirmer. D’ailleurs, sa prochaine publication sort ce 19 mai : la novella Et parfois elle revient, aux Éditions du Chat Noir :

mots clefs : novella, deuil, romance saphique / illustration de Mina M

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Publié dans chronique personnelle

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