Aude Ziegelmeyer, Peau d'Âme - Livre 1 : Les Lilas du Roi, Éditions Gulf Stream, 6 mars 2025
4ème de couverture
Au cœur du royaume du Roncevaux se cache le Palais d’Or. Véritable écrin entouré d’une forêt surnaturelle, il renferme les deux joyaux de son roi : un âne enchanté et la princesse Blanche d’Ivrée.
Cloîtrée derrière les murs dorés qui l’ont vue naître, Blanche passe ses journées hantée par les souvenirs de sa défunte mère. Lorsque son père lui annonce son projet de se remarier à la suite du bal donné pour l’anniversaire de la jeune femme, celle-ci comprend qu’il a renoncé à faire d’elle son héritière. Le roi compte d’ailleurs profiter des festivités pour la présenter à Armand Meslay, le fils de sa plus grande rivale. Cette alliance pourrait empêcher la guerre qui s’annonce entre leurs royaumes.
Blanche n’a que peu de temps si elle veut convaincre son père qu’elle est aussi sage que l’était sa mère, et donc digne de lui succéder. Elle ne voit ni la folie qui embrase les yeux de ce dernier, ni l’adoration qui illumine le regard de celui que la cour surnomme le « Fou du roi ».
Rattrapée par les effroyables secrets que dissimule le souverain, la princesse d’Ivrée est prête à tous les sacrifices pour échapper au piège implacable qui se referme sur elle. Jusqu’à conclure un pacte magique. Or, dans une tour oubliée du Palais, une fée enfermée depuis des années attend son heure. Celle de la vengeance.
Une princesse transformée en bête sanguinaire pour se libérer de ses chaînes dorées…
Une série envoûtante qui jongle avec les contes, s’inspirant de ce qu’ils ont de plus merveilleux comme de plus terrifiant.
À dévorer sans attendre.
/https%3A%2F%2Fgulfstream.fr%2Fwp-content%2Fuploads%2F2025%2F02%2FCouv-Peau-dame-T1.jpg)
Peau d'âme - Livre 1 / Les lilas du roi
Peau d'âme - Livre 1 / Les lilas du roi - dès 15 ans ** d'Aude Ziegelmeyer - Gulf Stream Éditeur - 23€.
https://gulfstream.fr/produit/peau-dame-livre-1-les-lilas-du-roi/
Avant-propos
À peine paru, ce premier tome de la duologie Peau d’Âme a connu un succès immédiat, tant qu’un second tirage a été aussitôt amorcé. Comme vous, j’avais été envoûtée par sa magnifique couverture, la beauté de l’objet livre (jaspage, couverture semi-rigide soft, illustrations de garde en couleur et intérieures pleine page – dont certaines signées par l’autrice qui est aussi illustratrice !) et les thématiques.
Si cet univers se veut une réécriture sombre de Peau d’Âne, des références à d’autres contes ponctuent ce récit fascinant qui métamorphose son héroïne, la princesse, en bête. Je vous en dis plus ci-dessous.
Mots clefs
Young adult – fantasy féerique – réécriture de conte – Peau d'Âne – female rage – féministe – conte sombre – monstre – faim – vengeance – deuil – folie – fou du roi – manipulation psychologique – dévotion – pacte magique – héritage – liberté – féerie – duologie
Mon retour
Marquée dans mon enfance par l’adaptation cinématographique de Peau d’Âne par Jacques Demy, j’ai retrouvé dans Peau d’Âme la démesure grandiloquente incarnée par le Palais d’Or. C’est tout un enchantement qui semble porter ce dernier et le jardin des lilas (au parfum étouffant), écrin protégé de la forêt surnaturelle. Vous connaissez l’histoire : la princesse, ici Blanche, fait le deuil de sa mère, dévouée à son père. Jusqu’à ce que la folie ne pousse celui-ci à vouloir épouser sa propre fille.
En reprenant les codes des contes dans leur version sombre, Aude Ziegelmeyer prend soin de s’intéresser aux éclats dans la peinture rutilante de ce royaume patriarcal. Le roi n’a pas pour intention de faire de Blanche son héritière. À coup de manipulation psychologique et en l’affamant pour qu’elle soit maigre, il veut la modeler à son idéal ; et s’il entend dans un premier temps la marier à un prince rival pour empêcher une guerre, « — Si sa chère fille ne peut vaincre cette menace ni par son intellect ni par sa bravoure, il espère que, peut-être, sa beauté le pourra. », il décide finalement d’en faire sa propre épouse.
Mais Blanche est intelligente, et elle a faim.
Elle se défait du carcan de la jeune femme docile et belle érigé pour elle, pour toutes les autres femmes, tout comme elle se défait de l’ombre de sa mère après avoir découvert des secrets. Si pour gagner sa liberté il faut pactiser avec une fée enfermée dans sa tour, elle le fera.
(…) j’obéissais au moindre de ses ordres avec un dévouement qui frôlait l’hérésie. Il aurait pu exiger que je me jette des remparts du Palais, mon corps aurait obéi. Mon esprit, lui, se retranchait là où personne ne pouvait l’atteindre. Durant mes leçons de danse, de chant, de luth ou de broderie, je l’envoyais courir dans la forêt. En surface ne restait que la créature docile qu’il avait éduquée.
De l’âne magique qui fournit la richesse du royaume, aux robes couleur du jour, de nuit, et du temps, en passant par la marraine fée et l’émancipation de la princesse qui refuse d’épouser son père, l’on retrouve bien les archétypes du conte original, mais l’autrice les brode à sa manière. Prince, chevalier et fou du roi entrent dans la danse, de même que les cousines de Blanche (Margot ❤) et les fées : autant de personnages secondaires qui apportent réellement quelque chose à l’intrigue, lui offrant originalité comme fond.
Le récit de Blanche hurle la rage et la vengeance, l’émancipation féminine, la sororité. D’où la métamorphose de la princesse en bête affamée, cathartique. Un pacte magique pousse un autre au désenchantement, dévoilant la pauvreté d’âme. Quel est l’héritage de Blanche à présent ? Son royaume se déchire, mais le royaume voisin pourra-t-il l’aider ? Ou devra-t-elle compter sur d’improbables compagnons ?
Des pétales roses en forme de cœur barbotaient dans certaines tasses. On racontait que c’était de bon augure lorsque les fleurs des cerisiers se décrochaient des arbres pour valser dans le thé. La promesse d’un avenir doux comme le printemps. Plus jeunes, mes cousines et moi les récoltions, ainsi que des herbes et tout ce qui paraissait nécessaire à nos jeux d’enfants, pour concocter des potions que nous busions en psalmodiant des incantations vouées à réaliser nos rêves les plus fous. Agnès demandait toujours le grand amour, et Margot la capacité de voler. J’étais incapable de me souvenir de ce que je souhaitais alors.
L’autrice renverse également les codes en ne proposant pas une histoire d’amour entre la princesse et le prince. À la place, elle insère le personne du fou, qui fait montre d’une profonde dévotion à Blanche. Ce personnage atypique, dans son monde, décalé, promet une grande profondeur et sans doute des failles. Il apparaît comme hors du temps, accompagné de son fidèle bâton surmonté de Canard, fou à sa façon, mais au cœur pur. J’ai hâte d’en apprendre davantage à son sujet dans le prochain et dernier tome de cette duologie !
La maison d’édition annonçait un « slow burn », toutefois la romance n’est pas au rendez-vous, l’autrice amorce une relation plus intelligente (et d’ailleurs, est-ce que ce sera une romance ? J’ai le sentiment que l’amour pourrait être autre).
À la première personne du singulier, la plume d’Aude Ziegelmeyer se révèle fluide mais non dénuée de style. L’on sent toutefois le public young adult visé car, si elle brosse son récit de façon entraînante, allant à l’essentiel, cela laisse un effet survolé moi qui aime tant la présence plus marquée du world building. Toutefois, l’on ressent bien le propos et les personnages, parmi lesquels les personnages secondaires ne sont pas en reste (je me répète, car ce point est pour moi essentiel), même si certains disparaissent rapidement.
— Dans les Braises et les Marécages, murmura-t-il, dans les pactes et les mariages, dans l’or et le sang, la dame engloutit son roi, la louve son ours, la lune son soleil, et parmi les bêtes, les bâtards réécrivent l’histoire. Dis-moi, quelle place reste-t-il, entre les bêtes et les bâtards ? De quel côté du damier brûle-t-on le fou ?
— T’es cinglé. Voilà ce que t’es, toi, et ce que tu resteras. Fou.
La seconde partie du roman dessine un échange original entre Blanche et la bête, comme deux facettes de la première, fil cathartique et deuil (deuil de sa mère, deuil de la version d’elle-même modelée par les injonctions de son père), souligné par la bête qui s’adresse à Blanche comme à « la fille morte ». Blanche s’émancipe, englobant une meilleure compréhension du monde dans lequel elle vit (la situation géopolitique), et cela passe par la mort (symbolique) et la renaissance (au sens propre comme au figuré, mais je ne peux pas spoiler).
Alors que le conte original dépeint une princesse qui fuit l'inceste et s’émancipe pour finalement épouser un prince (même si mariage d’amour), ici Blanche veut sauver son royaume, son héritage, le défaire des illusions imprégnées par son père. Là où il n’était pas question d’héritière, elle veut mettre une femme sur le trône. La thématique féministe s’attaque au modèle patriarcal, dénonçant l’emprise masculine sur l’apparence et l’identité des femmes (notamment par le père de Blanche qui la manipule et l’affame), tandis que la génération de Blanche esquisse l’équité.
— Le roi aurait certes mérité de brûler, dit-il, comme il a mérité de devenir gibier, mais nous autres ? Je nous rêvais libres.
En bref
Réécriture féministe et actuelle de Peau d’Âne, Peau d’Âme offre un écrin sombre avec sa touche de féerie, mais prenez garde aux apparences, et aux vœux que vous formulez, au risque qu’ils ne se réalisent…
Récit young adult, le roman offre tout de même une réappropriation des codes du conte original en faisant de l’émancipation de Blanche une quête qui la contraint à mourir et à renaître, en faisant d’elle plus qu’une princesse qui fuit pour finalement se marier à un prince.
Le traitement des personnages secondaires apporte également de l’originalité. Même si certains disparaissent assez vite, il est certain que nous les retrouverons dans le dernier opus annoncé pour le 16 octobre de cette année.
Vous aimerez aussi :
/image%2F0534469%2F20201009%2Fob_b6e3d8_20201009-152009-2.jpg)
Rouge, Pascaline Nolot, Éditions Gulf Stream, Collection Électrogène, 20 mai 2020 - Maude Elyther
4ème de couverture Ce qu'il vit avant tout, c'était l'immonde coloris écarlate qui rongeait à moitié le nouveau-né ainsi que l'infâme petite boule de peau surplombant son regard. Le monstre ...
/image%2F0534469%2F20230809%2Fob_a26cb1_20230809-151052-2.jpg)
Christophe Guillemain, La Morsure des Roses, Éditions Mnémos, 23 août 2023 - Maude Elyther
Illustration : Cyrielle Foucher / Graphisme : Atelier Octobre Rouge 4ème de couverture Caelynn, la plus jeune fille du dieu Ur-Orio, a passé son enfance sur le mont Eremion avec ses quatre sœurs...
/https%3A%2F%2Fimages.weserv.nl%2F%3Furl%3Dhttps%3A%2F%2Feditions-actusf.fr%2Fimages%2Farticles%2F85385%2Fcover.jpg%3Fv%3D2)
Tachan : "Passionnante fantasy politique s'inspirant avec bonheur de celle des premiers temps de Robin Hobb, les longueurs en moins, l'ambiance de cour en plus." La Merlette : "Une merveilleuse ...
https://editions-actusf.fr/a/thibault-lafargue/le-bouffon-de-la-couronne
Un roman avec pour personnage principal un Fou du roi !
J'ai également lu - https://www.dargaud.com/bd/bleu-la-lumiere-du-jour/bleu-la-lumiere-du-jour-bleu-la-lumiere-du-jour-bda5446200
/image%2F0534469%2F20250425%2Fob_ecd28d_couv-peau-dame-t1.jpg)
/image%2F0534469%2F20250425%2Fob_956e41_design-sans-titre-5.png)
/image%2F0534469%2F20250425%2Fob_25aa9d_design-sans-titre-5.png)
/image%2F0534469%2F20250425%2Fob_019d34_20250425-153136-2.jpg)
/image%2F0534469%2F20220828%2Fob_09431e_20220828-153433.jpg)
/image%2F0534469%2F20250425%2Fob_1659fc_9782205204506-couv.jpg)