Marge Nantel, Hors Caste, Éditions Mnémos, 23 avril 2025

illustration de couverture : Ebrahel Lurci / design : Atelier Octobre Rouge

4^ème de couverture

À Hemurn, où la magie détermine le rang social, Suèhl est un paria. Dépourvu du Don, il a pourtant su tirer son épingle du jeu et rester en vie… jusqu’à maintenant. Quand il croise la route de Ténèbres, un étranger aussi puissant que mystérieux, Suèhl n’imagine pas qu’il vient de l’impliquer malgré lui dans les luttes de pouvoir de son Clan. Contraints de fuir, les deux hommes s’allient pour survivre. Des rivages de l’Océan qui Sommeille aux montagnes de Kenan, ils devront affronter des créatures féroces, leurs propres congénères… et les démons de leur passé. Car au milieu d’un conflit qui les dépasse, leur complicité naissante pourrait bien constituer un salut aussi fragile qu’inattendu.

Après quinze ans passés à habiller messieurs les comédiens, Marge Nantel a rejoint la sphère de la littérature au sein d’une structure de sensibilisation à la lecture et à l’écriture. D’histoire en histoire, elle explore un monde imaginaire en perpétuelle expansion. Après son roman Code Ardant (Prix Utopiales 2024), elle nous plonge avec Hors Caste dans un univers de dark fantasy aux tréfonds de l’âme humaine, fait de noirceur et de violence, où la compassion et l’amour peuvent se révéler plus forts que les armes.

Hors Caste

Sortie : 23 avril 2025 ISBN : 978-2-38267-191-7 / 336 pages /grand format à rabats / 22 € Illustration : Ebrahel Lurci

https://mnemos.com/livre/hors-caste/

Avant-propos

Je remercie chaudement Estelle Hamelin des Éditions Mnémos de m’avoir envoyé, à ma demande, ce roman en service presse ! Ce fut tout simplement un coup de cœur avec ce titre qui présente quantité de thèmes qui me plaisent, avec des personnages non-humains et l’univers riche d’une dark fantasy dont les ténèbres s'apaisent.

Fun fact : j'ai retrouvé dans le personnage de Suèhl beaucoup de Monet, Chat issu de ma fantasy animalière, même si Monet est 100% anthropomorphique et baigne dans un univers coloré et féerique, et se montre froussard lui qui se dit voyageur.

Mots clefs

Dark fantasy – fantasy originale – personnages non humains – homoromance – tendresse – lgbt normalisé – personnages inoubliables – pierres magiques – enquête – magie – dangers – rang social avec système de castes – lutte de pouvoir – intrigue politique – démons du passé – violence – pardon – deuil

Mon retour

Une fantasy originale pour une voix singulière de l'imaginaire francophone.

C’est le premier roman que j’ai lu de l’autrice (depuis, j’ai déjà enchaîné avec La cité sous les cimes, et il me tarde de me procurer Dans l’ombre des miroirs, tous deux aux Éditions 1115, ainsi que Code Ardant, aux Éditions Mnémos), sachant qu’il s’agit ici d’une seconde édition pour ce texte. Je l’avoue, j’ai été fascinée par la couverture : ces deux personnages, les couleurs… Alors j’ai été plus que ravie de le recevoir en service presse (même si autrement, je l’aurais acheté, bien entendu). Et la lecture ? Un coup de cœur, rien que ça.

Marge Nantel nous propose un univers riche à tous les niveaux, alors mon cœur ne pouvait que battre. Pour d’autres « un peu trop complexe », j’ai vite glissé dans les mailles du récit, entre les castes/Clans, les mœurs et traditions de plusieurs contrées, ce qui est avant tout illustré par les deux personnages principaux, Suèhl et Ténèbres, mais j’y reviendrai plus loin.

Non contente de brosser un monde bien construit et détaillé, âpre et violent (castes, discriminations, intolérance, guerre et démons du passé entre autres), l’autrice donne vie à une galerie de personnages incroyables, les personnages secondaires sont également variés et attachants (l’Auxiliaire Atra, Manev et Ithyl, dame Rymà, Asleev, Vaela Dial…), sans oublier les antagonistes bien campés.

En fin, si je ne m’abuse, nous ne croisons qu’un ou deux personnages humains, les autres sont non-humains : d’où les castes/Clans dans le royaume Hemurn où vit Suèhl (Féli – félins, Sauro – reptiles, Simur – phœnix, et Chélon). Suèhl Mri est un Féli ; il ne rencontre que dédain (à quelques exceptions près) car il a plus d’un félin que d’un humain. En effet, la légende veut que, au contact de la magie d’Hemurn, 4 espèces d’animaux ont été humanisées. Mais il y a également les Avéens et Piscanéens, du côté du peuple des montagnes de Kenan d’où vient Ténèbres. Vous croiserez également des Elfes, enfin un en particulier, et des monstres.

À Hemurn, s’il existe donc 4 castes distinctes, les Quatre Clans, chacune d’elle confère un statu plus ou moins élevé aux individus selon leur magie. En effet, plus une personne possède de magie et plus elle est physiquement humaine ; a contrario, moins elle en a, et plus ses caractéristiques physiques se rapprochent de l’animal (les yeux, les écailles, la fourrure, la langue bifide, les plumes, les dents pointues, les griffes, de même que grognements et autres miaulements). Pour Suèhl, c’est encore pire car aucune magie ne réside en lui, aussi il est un paria, un hors caste, et ce malgré ses origines princières.  

Alors lorsqu’il rencontre Ténèbres (aka Lag pour les intimes) à l’officine où l’Auxiliaire Atra l’embauche en tant que convoyeur de pierres, il est tourneboulé [oui, je reprends le terme utilisé par l'autrice, mais il sonne mieux que "troublé" que je pensais utiliser à la place]  par le fait que celui-ci, puissant du fait qu’aucun trait animal n’entache sa physionomie ou ses traits, et porteur de la jade des Grands Invités, lui adresse la parole.

Ténèbres est venu à Hemurn pour demander assistance à propos d’une pierre qu’il est persuadé dotée de conscience. Aussi, les deux hommes ne tardent pas à se recroiser et un élan de sympathie les lie aussitôt. Ce qui donne lieu, dans le monde de Suèhl, à une situation cocasse tant qu’inadéquate lorsqu’ils se retrouvent à la même table dans un débit de boissons. Car là ne peut être la place de Ténèbres, parmi la populace de castes inférieures. L'Avéen quant à lui, profite que le Féli veuille bien lui répondre quant aux us et coutumes de Hemurn, qui sont complexes pour un étranger.

À ce propos, une tradition locale, barbare, éclate : le Prince actuel est mort, aussi, alors qu’un autre Féli du clan du Lynx lui succède, la Purge officie. La Purge traque les individus les plus inférieurs et les élimine. Seulement, certains membres de la Furie (la « police ») s’en donnent trop à cœur joie. Suèhl, dans leur ligne de mire, n’a que le choix de se cacher en attendant la fin de cette chasse. Malheureusement, il est découvert. Dans sa fuite, diminué par des jours d’immobilisme et de jeun, il manque être tué, roué de coups et à moitié éviscéré. Il est sauvé in extremis par Ténèbres qui, le reconnaissant, le prend sous son aile pour le faire soigner et le conduire loin du danger.

Suèhl et Ténèbres, se sont littéralement deux mondes qui se rencontrent. Malgré son statu de paria, qui lui a valu traumatismes et violence (encore aujourd’hui), le Féli est un homme bon et juste, chaleureux, qui aide les autres (je pense notamment au Sauro prostitué). Dédaigné pour ses caractéristiques animales, celles-ci lui confèrent toutefois des traits séduisants et captivants (ses yeux félins, le duvet de fourrure qui le recouvre, offrant une carnation non unie, sa longue chevelure qui se gonfle comme les poils d’un chat se hérissent) ; attendez-vous à l’entendre ronronner et gronder tout le long du récit (ce que j’ai adoré !).

À côté, nous avons Ténèbres, glabre, la peau caramel, exempt de toute distinction animale (à part… mais vous verrez cela par vous-même !). Avec sa longue chevelure noire et ses yeux or pâle, inutile de préciser qu’il plaît à tout le monde. Il possède en outre une aura orageuse et une autorité naturelle, qui lui vient de son ancienne vie qu’il fuit depuis 10 ans. Ne vous laissez pas duper par sa prestance et son charisme, autant  de démons que Suèhl voire plus le hantent.

Alors que Ténèbres sollicite Suèhl en tant que convoyeur pour découvrir le potentiel de sa pierre, le Féli et l’Avéen voyagent et sont amenés à enquêter sur des commandes inhabituelles de pierres, des drinites pâles, qui semblent liées à des monstres qui sortent de leur cache en hors saison, et à des disparitions de convoyeurs… Pour couronner le tout, des attaques sont perpétrées contre eux, alors que la Purge est terminée et qu’elle n’a pas lieu d’être en-dehors de Hemurn. Vengeance personnelle contre le Féli ? Démons du passé bien réels qui rattrapent Ténèbres ? Ou est-ce que cela aurait à voir avec l’affaire secrète à laquelle se consacre dame Rymà, la Féli de Haut Clan qui a missionné Ténèbres pour qu’il lui trouve une pierre rare, pierre qui permettra d’obtenir la vérité quant à la prise de pouvoir du nouveau Prince ?

L’autrice articule son roman via le point de vue omniscient de Suèhl et de Ténèbres, distillant des fragments de leur passé respectif, révélant leurs traumatismes (qui m’ont indignée et fait frissonner). Cette narration permet aussi d’amener les éléments nécessaires à l’instauration de l’univers à travers les mœurs, les castes, la magie etc.

Alors que Hors Caste est une immersion dans un univers de dark fantasy, la relation qui se tisse entre les deux hommes est lumineuse, pleine de tendresse, je l’ai trouvée si belle. Il n’y a pas de « dominant » / « soumis », Suèhl et Ténèbres apprennent à se connaître avec douceur et respect. Leur complicité et leur intimité dénotent leur évolution, les barrières qu’ils abaissent, le combat qu’ils mènent contre leurs démons intérieurs, contre le conditionnement qui les a forgés. Ils s’acceptent l’un l’autre, soucieux du consentement et des limites de l’autre, certaines s'abolissent d’ailleurs progressivement tandis que l’amour qu’ils se vouent l’un l’autre les transforme.

Les relations avec les personnages secondaires ne sont pas en reste, et construisent différents thèmes comme l'intolérance, les souffrances du passé, le deuil, mais aussi le pardon. Sans oublier le fond d'intrigues politiques, les sacrifices pour les belles causes ou une vie meilleure, les nouveaux rêves et espoirs pour le monde de demain. Parmi les personnages secondaires, je retiens, parmi d'autres, l'Auxiliaire Atra, Sauro loyale au cœur tendre derrière sa froideur et sa mesquinerie apparentes ; le couple de chasseurs Manev, Piscaléen, râleur et en mauvais terme avec Ténèbres du fait de leur passé commun, et Ithyl, Elfe indiscret et guérisseur, qui tempère et accompagne son amant traumatisé ; Asleev pour son tempérament de feu et son intelligence débrouillarde qui sort des sentiers battus ; dame Rymà qui porte le lourd fardeau de la recherche de vérité et incarne le changement, et pour sa relation attendrissante avec Suèhl ; ou encore le Simur Vaela Dial pour sa douceur et son incorruptibilité.

Coup de cœur oblige, j’aimerais vous en dire plus, mais je vais m’arrêter là en concluant avec la fin du roman qui offre une ouverture sur laquelle je rêve que l’autrice consacre un nouvel opus. Avec la découverte d’un autre continent, la promesse d’aventures lumineuses, les origines de Caillou (ah ce cher Caillou… tout un personnage !). J’espère de tout cœur que ce vœux soit exaucé !

En bref

Alerte coup de cœur !

Marge Nantel nous livre un univers éminemment mature, riche et complexe comme je les aime. Des personnages non-humains bien campés et attachants, des pierres magiques, une histoire d’amour tendre et bouleversante entre deux hommes, des démons du passé qui sont exorcisés au fur et à mesure, un monde violent de dark fantasy, des monstres… tels sont les ingrédients qui font le panache de Hors Caste.

Voilà un roman original, dense, profond, vibrant que je ne suis pas près d’oublier et qui fait de Marge Nantel, voix singulière de l'imaginaire francophone, une autrice que je vais suivre avec grand intérêt.

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De la même autrice, j'ai aussi lu (chronique à venir) / https://www.editions1115.com/produit/la-cite-sous-les-cimes-marge-nantel/

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Code ARDANT

Avril 2024 Isbn : 978-2-38267-129-0 /480 pages /grand format à rabats /24 €/couverture Angeline Bandong

https://mnemos.com/livre/code-ardant/

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